Page:Revue des Deux Mondes - 1917 - tome 38.djvu/411

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

foin des granges, dans les maisons longues et basses, sous les toits en bardeaux qui s’allongent pour couvrir d’un même abri les animaux et les hommes, au milieu des bois de la Madeleine et d’Herbaville, à la scierie de la Menantille, aux baraques de Sauceray, aux chalets des marcaires de la Groix-Idoux, aux Moitresses, à la grande scierie de Rougiville. Le ravitaillement n’ayant pu parvenir jusqu’à ces cantonnemens improvisés, plusieurs chasseurs s’estimèrent heureux de retrouver, au fond de leurs musettes, quelques bonbons que leur avaient donnés, l’avant-veille, les habitans de Saint-Dié, lorsqu’ils étaient entrés dans la ville, fanfare en tête et fanions au vent.

Le lendemain matin, 28 août, sur le coup de neuf heures, un automobile portant aux panneaux de sa carrosserie l’écusson de l’empire germanique, l’aigle rapace aux ailes éployées par une envergure menaçante, amenait à Saint-Dié, venant de Sainte-Marguerite par la rue d’Alsace, Son Excellence Karl-Albert von Knœrzer, général en chef. Ce personnage mit pied à terre devant les arcades de l’hôtel de ville, se lit présenter les adjoints, MM. Colin et Burlin, et leur commanda aussitôt d’afficher la proclamation que voici :


PROCLAMATION AUX HABITANS DE SAINT-DIÉ

Le gouvernement de la République française a fait passer ses troupes (sic) la frontière allemande pour venir en aide à la Russie.

Je sais combien cette guerre est peu populaire en France, qui vous a été octroyée par votre gouvernement contre la volonté bien déterminée du pays.

La parole est maintenant aux armes.

La civilisation européenne, défendue par l’Allemagne et l’Autriche contre les Serbes et les Russes, protecteurs de l’assassinat politique, et la discipline allemande bien connues (sic) sont la garantie que l’action armée ne se dirigera que contre les forces militaires.

Tous les non-combattans peuvent être sûrs qu’ils ne seront pas inquiétés ni dans leur personne, ni dans leur fortune tant qu’ils resteront tranquilles.

Les armées allemandes ont fait leur entrée en France.

Si bien que nous respecterons la liberté des non-combattans, si bien (sic) nous sommes décidés à réprimer avec la dernière énergie et sans pardon tout acte d’hostilité commis contre les troupes allemandes.