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parallèlement à cette influence de lente maïeutique, d’autres influences se sont exercées par la presse et par le livre. Ce sont elles que je voudrais étudier. Leur importance n’est pas littéraire seulement : elles étaient significatives de réalités agissantes et on s’aperçoit aujourd’hui qu’elles étaient grosses d’avenir. Elles offrent un intérêt qui dépasse leur valeur esthétique. Elles permettent d’estimer les directions et les pesées d’une force psychologique, enfin libérée, et qui se range de notre côté.


Toute une littérature de la guerre est née aux États-Unis, si vaste qu’il semblerait à première vue difficile d’en débrouiller la confusion et d’en dégager les traits dominans. Et cependant, un œil exercé à lire dans la psychologie américaine distingue vite les tendances qui inspirent pareillement cette multitude d’articles et de livres, les curiosités et les sentimens qu’ils satisfont. Et d’abord, quelles que soient les sympathies des écrivains, ils obéissent, presque tous, à certaines habitudes d’esprit qu’ils partagent avec leurs lecteurs. Les uns et les autres sont, en général, surtout épris du détail vivant et pittoresque, du fait concret et caractéristique, des documens émouvans et précis. La contribution américaine à la littérature de guerre a donc été, avant tout, un reportage qui se tient à la surface des choses, n’en donne que la photographie rapide, mais fidèle et vivante : c’est le témoignage d’un objectif exact qui reproduit des images et fournit des documens. Le lecteur américain pressé demande, surtout, des articles de journaux et de revues plutôt que des livres, des faits et des tableaux plutôt que des dissertations et des thèses ; il se soucie de voir l’aspect réel des choses plutôt que d’en pénétrer les causes. Presque tous ces livres ne sont, ainsi, que des recueils d’instantanés sans autre lien que celui que fournit le relieur ; on y chercherait vainement une préoccupation d’art ou de composition. Leur valeur est cependant réelle, et nous devons à Richard Harding Davis, Frederick Palmer.Owen Johnson, Alexander Powell, Wythe Williams, Arthur Ruhl, Will Irwin, Reid, Waller Hqle, Mary Rinehart, Robert Mac Cormick, Irvin Cobb, Joseph Patterson, — et combien d’autres que je ne cite pas ! — une matière brute d’observation où puiseront les historiens de l’avenir. Et puis, si rapides que soient les films sensationnels qu’ils établissent, si superficiels que soient les