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garde civique, Wachter son capitaine, Schapper, correcteur d’imprimerie, et Moll, président par intérim de l’Union des Travailleurs. Elle avait mis la main sur Becker et Schapper, mais les autres lui avaient échappé ; la population, furieuse, avait dévalisé les boutiques des armuriers et démoli les échafaudages de la cathédrale pour construire des barricades. Alors la police voulut réquisitionner 1 000 hommes de la garde nationale pour s’emparer de Wachter et de Moll, mais le bourgmestre refusa de signer l’ordre qu’on lui présentait. Le commandant de la place fit donc appel aux troupes prussiennes et menaça de bombarder la ville. Après quelques bagarres pendant lesquelles des coups de feu furent échangés, l’ordre se rétablit. Le 26 au matin, les barricades étaient détruites, l’état de siège proclamé, la garde civique dissoute et désarmée, tandis que les soldats patrouillaient dans les rues d’un air provocateur, sous la protection de canons mis en batterie à Deutz. Ces scènes tumultueuses n’accrurent pas le loyalisme des habitans.

Nous approchons du dernier acte du drame. Le refus par Frédéric-Guillaume IV d’accepter la couronne impériale détermine l’insurrection des pays rhénans. A Cologne, la municipalité convoque des délégations des autres villes de la région pour délibérer. La terreur de retomber sous le joug abhorré est telle que l’on est prêt aux dernières résolutions. L’assemblée déclare donc qu’elle accepte la constitution de Francfort, somme la Prusse d’en faire autant et formule les plus graves menaces. Le gouvernement répond en décrétant la mobilisation totale du corps d’armée rhénan. A Cologne, les mesures sont si bien prises que la population est tout de suite impuissante. Mais partout, les hommes de la landwehr refusent d’entrer au dépôt. De Bonn, Kinkel combine un coup de main sur l’arsenal de Siegburg et il échoue dans sa tentative. En revanche, à Iserlohn et à Elberfeld, les insurgés sont maîtres de la situation pendant quelques jours. A Düsseldorf, c’est le tocsin qui donne le signal de l’émeute. Des barricades se dressent, surmontées du drapeau rouge. Non contents de fusiller les Prussiens, bourgeois et ouvriers leur lancent des pierres, des tuiles, des immondices et les insultent. Au bruit des cloches qui sonnent sans désemparer, les troupes amènent du canon et prennent d’assaut les barricades de la Kommunikation et de la Flingerstrasse. Le 10 mai, tout est fini : vingt citoyens ont été tués, beaucoup