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voussures. Le travail fut conduit, exécuté et surveillé avec d’infinies précautions et les plus méticuleux scrupules… et pourtant, quand il fut achevé, il devint évident que la double opération de la dépose et de la remise en place des voûtes avait fatalement amené la suppression de certaines irrégularités d’appareil dont les jeux de lumière animaient et coloraient la matière et que quelque chose était changé, compromis, dans l’aspect général, désormais plus dépouillé, plus sec et plus froid. Les années se chargeront d’ailleurs d’atténuer, de patiner, d’harmoniser, et déjà leur action bienfaisante est sensible.

Tout de même, quand le moment vint, en 1907, d’opérer sur le porche septentrional, la commission des monumens historiques, qui avait dès lors les cathédrales dans sa juridiction, demanda qu’avant d’entreprendre les travaux, on tint d’abord séance dans le chantier, à pied d’œuvre. Les « archéologues » insistèrent vivement pour que, à tout prix, l’architecte renonçât à toute dépose et s’arrangeât pour maintenir les voussures pendant qu’il glisserait sous leur masse les nouveaux linteaux qui devaient en recevoir la retombée. Ce n’est pas ici le lieu d’indiquer par quels procédés techniques il vint à bout de ces difficultés périlleuses ; il suffit de constater aujourd’hui l’excellence des résultats obtenus.

A Reims, la grande rose de la façade occidentale s’écrasait sous le poids du pignon qui pesait sur elle. En 1906, il devint urgent d’y porter remède ; mais comment le faire sans altérer l’aspect de l’illustre façade ? C’est l’emploi des matériaux nouveaux mis depuis vingt-cinq ans à la disposition des architectes qui permit de résoudre la difficulté, sans rien changer à la forme extérieure. Une épine de ciment armé, absolument invisible, passée dans la maçonnerie, rendant les deux tours solidaires, fit office d’arc de décharge et mit l’admirable rose à l’abri d’une ruine certaine. Il est probable que, sous les formidables vibrations des bombardemens qui ont submergé Reims, elle se serait disloquée, écroulée et ne serait plus aujourd’hui qu’un tas de décombres, si ce travail n’avait pas été terminé avant 1914… De pareils exemples ne sont-ils pas pour rassurer ceux qui protestent déjà contre les restaurations futures ?


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Voilà où nous en étions quand le fléau exterminateur