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chapitre inédit dans l’histoire de l’architecture françaises Puisse ce qu’elle laissera après elle témoigner devant la postérité, quand le temps sera venu de classer ses créations dans une nouvelle liste des « monumens historiques, » que les Français du XXe siècle n’avaient rien perdu de l’esprit des ancêtres !… Mais quelle que doive être l’église neuve, qu’on place toujours à l’entrée, près du bénitier où tous les fidèles s’arrêtent, une inscription, avec un dessin gravé sur une belle pierre de chez nous par un artiste intelligent des vieilles formes et sensible à leur beauté propre, qui rappelle, avec la date de son assassinat et le nom de ses assassins, le plan et la silhouette du sanctuaire remplacé !


Nous avons essayé d’indiquer dans quel esprit, par quels organes, avertis par quelles expériences et par quelles erreurs, mais aussi outillés de ressources et de moyens d’action plus souples et plus pratiques, nous devons, pour ce qui concerne nos « monumens historiques, » nous préparer aux grandes tâches de l’après-guerre. Les pertes seront irréparables et les deuils trop souvent sans consolation. Gardons-nous au moins d’aggraver par des abandons trop précipités et par un culte sentimental des « ruines, » belles en soi et monitrices de haine, l’œuvre de mort de nos ennemis. Défendons, conservons tout ce que nous pourrons sauver de ce grand passé de la France, qui reste, en dépit de tant de reniemens, de mutilations et de dévastations, l’honneur de notre race et la parure de notre vieille terre… Et que l’on ne dédaigne pas, à l’heure où les décisions suprêmes devront être prises, de convier l’humble bon sens aux conseils de la nation ; il est de bonne race française et digne d’être écouté.


ANDRE MICHEL.