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apportait la vie aux pays envahis. Un état-major américain réalisait les achats et les répartissait par les soins des comités belges, qui s’étaient recrutés parmi les notables du pays. Lord Curzon, dans un discours prononcé à Mansion House, rappelait que trop souvent les œuvres d’assistance sont inséparables de corruption ou d’incompétence, sinon des deux à la fois. Aujourd’hui le travail se poursuit, sur une échelle inconnue auparavant, avec une honnêteté scrupuleuse : aussi les résultats ont-ils été décisifs. Le côté diplomatique n’a pas été le moins remarquable. Il a fallu obtenir des Allemands la liberté d’agir, alors que le parti militaire voulait affamer les populations pour forcer les Alliés à renoncer au blocus. En dépit des conventions, les autorités prussiennes tentèrent plus d’une fois de faire main basse sur les approvisionnemens de la Commission. De telles menaces, connues en Angleterre, étaient de nature à ralentir les expéditions. D’autres difficultés surgirent avec le gouvernement américain. Tous les obstacles furent écartés, et aujourd’hui, alors que les États-Unis, entrés en guerre, ne peuvent plus jouer le rôle de neutres au sein de la commission, celle-ci est assez fortement organisée pour continuer son œuvre. Elle le doit en partie à son président et à la confiance qu’il a su inspirer à ceux qui étaient en rapports avec lui.

N’oublions pas les difficultés particulières de la situation de ces Américains qui, jusqu’au printemps de 1917, étaient des neutres. Ils pouvaient être soupçonnés par les Allemands d’avoir des sentimens trop favorables aux Allies et par ceux-ci de ne pas faire assez pour eux. Peu s’en fallait au début que de chaque côté on les considérât comme des espions. Le ravitaillement admis, ou toléré en principe, dut être strictement réglementé, de façon à parer aux inconvéniens possibles ou réels d’une aide directe ou indirecte donnée à l’ennemi. Il devait demeurer en deçà des quantités nécessaires à l’alimentation, de façon à contraindre les populations à consommer leur production locale. La Commission, opérant sous les auspices d’agens diplomatiques de pays neutres, avait besoin d’un personnel qui contrôlât les distributions de vivres et de comités locaux chargés d’en contrôler tous les détails : plus de 35 000 agens belges et français veillent aux opérations et ont toutes facilités pour soumettre à la Commission leurs réclamations, immédiatement référées aux agens diplomatiques des nations