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conduisent en prison. « Pendant toute la durée de notre captivité, les étudians nous recherchèrent au risque de s’attirer les rigueurs de l’autorité et firent tout leur possible pour nous être agréables. » Mais l’auteur ne resta pas longtemps à Cologne et fut bientôt envoyé en Westphalie.

Quant au colonel Meyret, il a habité chez un Rhénan nommé Huberty. Il a connu toute la famille et ne tarit pas d’éloges sur ses hôtes ; il a trouvé chez eux un haut souci des convenances et une parfaite délicatesse. Puis, en ville, il a fait d’autres connaissances. Un soir, dans une brasserie, deux bourgeois cossus se sont approchés de lui, et le plus âgé lui a dit : « Je suis M. de la Motte-Fouqué ; ma famille, d’origine française, a été forcée de s’expatrier lors de la révocation de l’Edit de Nantes ; je suis devenu Allemand, mais notre cœur bat toujours pour la France. Voulez-vous nous faire l’honneur de prendre place à notre table ? Monsieur est mon ami. Herr Vilmahser a longtemps habité Paris et aime la France. » Ces braves gens rendirent de grands services à nos officiers ; au moment de la paix, M. de la Motte-Fouqué, à lui seul, leur avait prêté 4 700 francs. Plus intéressante que ces secours délicats fut la déclaration que firent un soir au colonel ses deux amis : « Vous avez dû remarquer que la population a accueilli avec respect ces prisonniers de Metz… Nous avions des drapeaux tricolores tout prêts pour votre arrivée, car il y a encore ici beaucoup de sympathies pour la France ; mais maintenant la grande Allemagne est faite. »

Plus au Sud, nous rencontrons les deux villes de Sarrelouis et de Trêves. Le capitaine Mège est resté fort peu de temps dans l’une et dans l’autre, mais il en a rapporté des impressions concordantes. A Sarrelouis, nos soldats ont été conduits dans une immense fabrique : les femmes sont venues au cantonnement en procession, chargées de tabac, de chocolat, de foulards qu’elles distribuaient aux captifs. A Trêves, même accueil, et, pour commencer, chaque prisonnier reçoit un tricot et une couverture. La ville n’est pas éloignée du Luxembourg et de la Belgique ; il est à la connaissance du capitaine Mège que beaucoup de ses camarades s’évadèrent pendant la première nuit et qu’ils y furent aidés par la population elle-même. D’ailleurs, nous possédons le rapport du bourgmestre, réimprimé par le plus récent historien de Trêves. Ce document n’avoue pas