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une méthode nouvelle, générale et puissamment originale a été créée, qui ouvre des voies profondes et neuves aux procédés de vaccination.

Mais auparavant, il est nécessaire, pour la clarté, de situer exactement la question de la fièvre typhoïde, telle qu’elle se pose depuis la guerre.


S’il est une maladie qui, malgré ses ravages du temps de paix, — il y a aussi des plaies par armes à feu en temps de paix, — est un des plus grands fléaux que la guerre traîne après elle, c’est bien la fièvre typhoïde. C’est que toutes les conditions sont réunies chez les troupes en campagne pour favoriser l’éclosion, l’extension et la gravité de cette maladie épidémique. Aussi, dans la plupart des guerres récentes, la typhoïde a-t-elle abattu autant ou plus d’hommes que les armes ennemies : tel fut notamment le cas dans les campagnes russo-turque, de Tunisie, du Transvaal, etc.

Et maintenant, pour mieux comprendre, par un contraste, tout le progrès réalisé, si notre pensée franchit d’un bond tous les lents tâtonnemens, tous les perfectionnemens progressifs que je vais résumer, nous voyons, d’après les chiffres officiels communiqués à une des séances récentes de l’Académie des Sciences par le professeur Vincent, que la mortalité par typhoïde était dans notre armée, pour chacun des huit premiers mois de 1917, inférieure à un homme sur cent mille. Comment, par quel échelonnement laborieux de découvertes, ce résultat magnifique a-t-il été obtenu ; comment peut-on espérer, grâce à la méthode de Le Moignic, améliorer encore pour nos effectifs le rendement de ces méthodes ? C’est ce que je voudrais indiquer maintenant. Je n’ai pas la prétention de tracer un tableau historiquement complet de la question, — un volume n’y suffirait pas, — mais je voudrais essayer d’en marquer rapidement les traits principaux, comme fait, la nuit, dans les lignes ennemies, le faisceau mince et soudain d’un projecteur, bistouri immatériel et luisant qui dissèque d’un coup et schématiquement les formes ténébreuses. D’ailleurs, quelques vues rectilignes d’ensemble conviendront mieux ici qu’une incursion en zigzag dans le labyrinthe touffu des faits et des controverses, bonne tout au plus pour le pas menu de ceux que Dastre appelait si plaisamment les « rats de laboratoire. » — Il faut regarder un beau paysage de loin, sinon un brin d’herbe malencontreusement placé devant notre pupille risque de nous masquer le Mont Blanc.