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voie de développement (enfans) de fournir le supplément de matériaux nécessaire à la croissance.

Autrement dit, et pour employer les termes de l’école, les alimens ne sont pas seulement des substances calorigènes, biothermogènes ou dynarnôgènes, ce sont aussi des élémens histogéniques, ou pour parler plus simplement, plastiques. Les divers alimens sont-ils capables de remplir simultanément, les deux rôles ? ou sinon, comment doit-on les classer à cet égard ? Avant de répondre à cette question, il convient de rappeler comment, chimiquement, se classent finalement tous les alimens.

Si l’on met à part une très petite quantité de substances minérales et de sels qui sont d’ailleurs, malgré la petitesse de leur apport, indispensables à l’entretien de la vie, mais dont l’étude sortirait du cadre de cette chronique (car ils sont toujours mêlés peu ou prou aux autres alimens et on n’a point à s’en préoccuper dans la pratique), on peut dire que tous nos alimens sont empruntés aux êtres vivans, sont des fragmens d’êtres animaux ou végétaux.

Si les alimens sont des combustibles, tous les combustibles ne sont pas des alimens, et. quand on fait le bilan de ceux qui le sont, on voit qu’ils se ramènent chimiquement tous à trois espèces de substances simples : d’une part, les albuminoïdes qu’on appelle aussi protéines ou alimens azotés ou quaternaires, car les savans ne sont jamais à court de noms de baptême pour les choses les moins bien connues ; d’autre part, les graisses qu’il n’est pas besoin de définir autrement et qui comprennent les huiles et les beurrés ; enfin les hydrates de carbone, qui comprennent les amidons ou fécules et les sucres, c’est-à-dire le tissu constitutif principal des végétaux.

Cela chagrinera peut-être les gourmets d’apprendre que les innombrables mets et les petits plats, que les milliers de variétés de légumes, de poissons, de viandes, d’entremets où se complaît leur raffinement se réduisent tous à ces trois catégories. C’est que la chimie est une grande simplificatrice et que, finalement, en dépit des apparences, il y a bien peu de variété dans les choses de ce monde sublunaire.

Qu’on ait donc mangé du pain sec ou un somptueux repas aux multiples services, le bilan de ce qui a été fourni à l’organisme pourra toujours s’établir avec trois nombres représentant les poids fournis à l’estomac de chacune de ces trois sortes de substances.

Et à ce propos une remarque s’impose d’abord, sur laquelle le professeur Lapicque a récemment et très justement attiré l’attention :