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XVIe siècle dans la chrétienté, il a écrit ces mots pleins de sens : « Retenus par les mains de trois souverains terribles, qui goûtaient peu les exagérations populaires, et retenus aussi, c’est un devoir de l’observer, par un bon sens supérieur, les Anglais purent, dès le XVIe siècle, résister, jusqu’à un point remarquable, au torrent qui entraînait les autres nations, et conserver plusieurs élémens catholiques. » Il mettait en votre nation une espérance extraordinaire, et ceux-là peuvent s’en rendre compte qui ont lu son livre : Du Pape. Il faut bien qu’il en soit ainsi, et qu’il y ait, dans votre peuple, et, plus justement, dans votre âme religieuse, quelque chose de singulièrement proche de notre âme à nous-mêmes, pour que les plus religieux d’entre nous, nos prêtres les plus réguliers, nos religieuses les plus pieuses, n’aient cessé de ressentir l’attrait du caractère profond de ce peuple au milieu duquel l’esprit d’apostolat ou les circonstances historiques les faisaient vivre. J’ai été frappé des tendres expressions dont se servait, pour désigner l’Angleterre protestante, un fils de nos provinces du Nord, l’abbé Lelièvre, mort au service de vos pauvres, après avoir fondé, dans beaucoup de vos comtés, des asiles pour les vieillards indigens.

Combien de fois n’ai-je pas entendu des prêtres, des moines, des religieuses, réfugiés sur le sol anglais, lorsque la liberté chez nous oubliait ses promesses et que vous continuiez d’en suivre les principes, me dire combien ils trouvaient de droiture, de bonne foi, de respect, et souvent d’assistance, parmi les pauvres ou les riches de votre pays ! Laissez-moi vous le dire et sortir un moment du ton coutumier des conférences, pour vous faire une sorte de déclaration, inspirée par ma foi. Vous avez recueilli nos prêtres exilés à l’époque de la Révolution, et c’est par milliers qu’ils ont vécu au milieu de vous. De même, il y a quelques années, vous avez de nouveau ouvert vos portes à ceux et à celles qu’une erreur passagère de nos gouvernemens avait privés du droit de vivre selon leur vocation. Vous êtes une terre d’asile. Eh bien ! ce sont là des mérites nationaux ; il n’est pas possible qu’ils ne soient pas, dès ce monde, et dans les destinées mêmes de la nation, récompensés. Des prières innombrables se sont élevées, sans que vous le sachiez, pour le bonheur de la Grande-Bretagne, et, pour ma part, sans savoir ce que vous recevrez, je suis profondément convaincu qu’à