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défendu d’un littoral où l’ennemi avait accumulé tous les moyens de défense, et on avait réussi, en dépit des bancs, des mines, des filets, des canons, des engins de toute espèce, à s’établir sur le môle de ce port et à le ruiner autant qu’on avait voulu, tout en obstruant pour longtemps sans doute le chenal qui avait livré passage, depuis trois ans et demi, à tant de sous-marins, à tant de torpilleurs, à tant de mouilleurs de mines !

Elle n’était donc pas intangible, cette côte ennemie ; ces bancs n’étaient donc pas infranchissables, ni, non plus, ces barrages de filets et de mines ? Et si les canons, les mitrailleuses, insuffisamment contrebattus, s’étaient montrés meurtriers, sur ce môle sanglant, comme ils le sont sur les champs de bataille de la Somme et de la Lys, l’admirable dévouement, la complète abnégation de soi des officiers, des marins, des soldats des brigades navales anglaises l’avaient emporté sur la puissance d’un feu infernal, exécuté à bout portant. La mort avait cédé devant la volonté d’une troupe héroïque, déterminée à accomplir exactement la tâche qui lui avait été confiée.


Quelle sera la suite de cette opération qui a soulevé un juste enthousiasme et fait naître tant d’espoirs ? Quelles peuvent en être les conséquences dans un avenir prochain et les répercussions sur les desseins des Alliés ? C’est ce qu’il nous reste à examiner.

Les suites immédiates, d’abord :

Le chenal de Zeebrugge, le plus important, est pour le moment impraticable[1]. Celui d’Ostende est à peu près intact. Les mouvemens des navires allemands (et ce n’est pas seulement ceux des navires de guerre ; il y a un bon nombre de petits « cargos » qui font le va-et-vient de la côte belge à Hambourg), ces mouvemens, dis-je, vont par conséquent se faire par Ostende, jusqu’au moment où les obstructions de Zeebrugge auront été détruites.

Mais, d’une part, il appartient aux Alliés de retarder longtemps l’époque où la passe de Zeebrugge deviendra libre, et, de

  1. Notons ici qu’il est difficile à des sous-marins et à des torpilleurs d’assez forte taille de conserver pour base de refuge un port où ils ne peuvent rentrer que dans des circonstances favorables de temps et de mer, avec beaucoup de précautions, en risquant échouages et avaries, en risquant surtout d’être longtemps canonnés par les unités qui les poursuivent.