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j’écrive des deux mains ? Alors, qu’il imprime des deux pieds. Il sait bien dans quels embarras je me trouve par suite de mon procès. Depuis que j’ai fait fortune, je n’ai plus de pain. Je sais qu’il crie misère de son côté ; il a peut-être raison, mais si nos deux misères ne lâchent pas de s’entr’aider, elles iront toutes deux de mal en pis…

« Adieu, mignonne. Pourquoi fourrez-vous votre joli nez dans ces sales propos d’argent ? Cela me force à vous écrire des bêtises assommantes ; je voudrais n’avoir à vous dire autre chose sinon que vous êtes bonne, jolie, et que je vous aime de tout mon cœur.

« Tout à vous[1] .

« GEORGE. »


Pendant ce temps, Maurice a été malade, Solange a eu la petite vérole, mais elle ne sera pas marquée. Voilà les phrases qui reviennent sous sa plume… Maurice convalescent, dévore les Contes d’Hoffmann, car la traduction de Loëve-Weimars a mis Hoffmann à la mode, et George Sand n’a-t-elle pas l’idée de « faire une fin à Jean Kreyssler ?… Il y a longtemps que j’en ai envie ; » mais cette fin, elle ne l’écrira jamais, car elle n’a pas assez de temps pour toutes les idées de sa cervelle ; cette année 1837, avec Mauprat, elle donne à la Revue les Maîtres mosaïstes et la Dernière Aldini. Aussi, quand F. Buloz lui réclame le drame fantastique dont elle lui a parlé, et Engelwald, elle s’étonne : « Il me semble, mon vieux, qu’à moins de me mettre dans tous vos numéros, vous ne pouvez pas désirer davantage ! »

Quelques mois plus tard, en juillet, George s’adresse à Mme F. Buloz ; elle s’impatiente. L’édition de ses œuvres complètes qu’a entreprise Bonnaire « se traîne lamentablement, » et, bien entendu, c’est Buloz qu’elle rend responsable ; n’est-il pas tout dans l’association ? La vérité est que les livres se vendaient peu, et que Bonnaire hésitait à lancer de nouvelles éditions. Mais George charge Mme Buloz de gronder son mari.


« Ma chère Christine,

«… Mauprat aussi est en retard, dans la Revue. Je désire qu’il m’envoie l’épreuve de la première partie, et qu’il la fasse

  1. Inédite.