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les agents de l’ambassade veulent les reprendre, ils se heurtent à un refus. Et le ton de ce refus est tel qu’ils n’insistent plus. C’est apparemment la première fois que l’esprit d’intrigue de l’ambassadeur et la suffisance ingénue de l’Allemagne se heurtent, pour subir une défaite, à la perspicacité, à la loyauté et à l’humour américains. Le fait s’est représenté depuis.

L’ambassadeur allemand n’est pas de ceux qu’un échec décourage, loin de là. N’ayant pas réussi ici, il regarde aussitôt ailleurs. Et c’est alors qu’il rédige, écrit, envoie le fameux rapport confidentiel où il expose avec minutie le programme qui doit assurer à l’Allemagne, avec le contrôle exclusif de toute la publicité concernant les nouvelles allemandes, la direction générale de l’opinion américaine par le puissant moyen de la presse. C’est dans ce rapport que se trouve la curieuse clause suivante :

« Afin d’atteindre notre but, il est nécessaire de commencer et continuer une campagne de presse qui soit adaptée aux désirs et à la manière de voir du public américain. Tout doit lui être communiqué sous forme de nouvelles, car il a été habitué à cette forme et ne comprend que cette sorte de propagande. La valeur d’une telle campagne de presse en Amérique, si elle est faite par des Américains pour des Américains, sera incalculable. »

Faire diriger la propagande allemande en Amérique par des Américains, telle est la formule qui dominera dans la suite toute la politique de l’ambassadeur aux Etats-Unis. Il y insiste dès maintenant. Des correspondants américains devront être invités, envoyés sur tous les fronts allemands ; toutes facilités devront leur être données « pour voir tout ce qu’ils doivent voir. »

« En outre, le Ministère des Affaires étrangères devra autoriser les correspondants américains à télégraphier quotidiennement par T. S. F. trois à quatre mille mots. Je désire insister sur ce point qu’un seul marconigramme, envoyé par M. Cory (correspondant américain) et favorable à la cause allemande, a été plus utile pour cette cause que tous les rapports officiels expédiés par le gouvernement depuis le début de la guerre. »

Le service d’informations devra être présenté comme « nouveau, permanent et destiné à mettre le public américain en relations directes avec les affaires politiques, diplomatiques et