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Gand sont tout autres. Le pays flamand n’avait nul besoin d’une université française de l’Etat, dont la fréquentation causerait du tort à l’enseignement flamand et dont l’existence ne concordait pas avec l’égalité de droits et de culture, sur quoi se fondent les revendications flamingantes. Son maintien n’était demandé que par une minorité, qui se dressait contre les vœux et méconnaissait les besoins de la grande majorité de la population. L’enseignement français, possédant son université officielle à Liège, capitale intellectuelle du pays wallon, l’enseignement flamand devait avoir la sienne à Gand, centre universitaire de la région flamande.

La législation belge a toujours respecté le droit des parents de faire instruire et élever leurs enfants dans la langue de leur choix. Si la bourgeoisie flamande ne voulait pas abandonner ses traditions de famille, elle aurait à sa disposition dans son voisinage les Facultés françaises de Bruxelles et de Louvain. Nombre de Flamands envoyaient déjà leurs fils étudier dans la vieille maison Louvaniste, où fleurit depuis la fin du moyen âge en enseignement célèbre sous la haute direction de l’Eglise.

Comme les discussions prolongées n’ont généralement pour effet que d’échauffer les disputeurs, sans qu’ils démordent de leurs opinions, les partisans de l’Université flamande de Gand ne voulurent rien céder de leurs exigences. Ils entendaient qu’elle fût la et nulle part ailleurs.

Le 31 mars 1911, six députés, six des principaux chefs du mouvement flamand, appartenant aux trois partis politiques, déposèrent ensemble une proposition de loi tendant à la transformation graduelle de l’Université de Gand en université entièrement flamande. Cette proposition, renouvelée l’année suivante, fut discutée par les sections de la Chambre des Représentants, qui adoptèrent en principe la création d’une université flamande. De son côté, le gouvernement avait déclaré qu’il était du devoir des Chambres de trancher la question dans la prochaine législature, quand la lutte mondiale a éclaté, fermant les portes de notre Parlement, laissant en suspens la désignation de la ville universitaire. Mieux eût valu assurément que le différend eût été réglé d’un commun accord et la paix rétablie dans les esprits avant l’apparition de l’ennemi, car il s’est emparé de la question flamande pour souffler la discorde et jeter un brandon de guerre entre les Belges.