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étaient entravés depuis quatre jours : nul doute que ces entreprises n’aient grandement contribué à rendre moins effroyable le choc que l’état-major allemand avait cru irrésistible.

En fait, dans les journées du 1er et du 2 avril, l’assaut, attendu depuis le 28, subi les 29, 30 et 31, se fractionnait en attaques assurément violentes, mais localisées dans la région de Grivesnes et au Nord de Moreuil. De sept heures du matin à sept heures du soir, les Allemands étaient rejetés à trois reprises sur la première de ces localités ; non seulement ils avaient été repoussés, mais nous avions achevé de nettoyer ce parc de Grivesnes où, la veille, nous avions obtenu un si beau succès. D’autre part, les Anglais, soutenus par nos troupes, avaient contre-attaque dans la région Sud de Domart, vers le ravin Sud-Est de Thermes : nos Alliés, reprenant une attitude offensive, contre-attaquaient encore dans le bois au Nord de Moreuil. La bataille changeait donc de caractère et les Allemands repoussés étaient même parfois reconduits.

La 29e division avait pris position de façon à barrer la vallée de la Luce ; des bataillons organisaient activement Hangard et Thennes : ainsi, en cas de fléchissement, serait interdite à l’ennemi toute irruption sur les deux routes d’Amiens, celle de Roye, comme celle de Montdidier. La limite entre les deux armées alliées avait été nettement tracée de façon qu’aucune confusion ne pût se produire dans le combat. Et derrière la ligne, tous les jours mieux tenue, Debeney organisait ses réserves grossissantes. Si l’assaut se produisait, l’ennemi trouverait maintenant non plus des troupes forcément tâtonnantes, mais une ligne de résistance rationnellement et méthodiquement organisée. Notre aviation continuait sur les gares de Rosières, de Chaulnes, de Roye, de Nesle, de Guiscard, de Ham son impitoyable travail, paralysant, ainsi que notre artillerie à longue portée, la marche de l’ennemi, et celui-ci, dans la journée du 2 avril, semblait peu tenté de reprendre ses assauts. Les journées des 2 et 3 furent aussi relativement calmes, heureuse circonstance au moment où nous relevions au Nord les troupes britanniques dans la vallée de la Luce et achevions de refaire la soudure entre les deux armées alliées.

Le général Debeney pouvait écrire le 2 : « La 1re armée a réalisé la soudure entre les armées françaises et britanniques ; sa ligne de bataille est formée, son déplacement terminé. »