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admis dans la collection officielle. Il ne m’appartient plus, et son sort est d’être enseveli dans les Mémoires de notre classe… je vous avoue que votre proposition me donne quelques regrets[1]. »

Une autre fois, Sainte-Beuve (toujours pour rendre service à Cousin) envoie à F. Buloz un billet du philosophe. Je ne sais ce que celui-ci désire, mais il le désire ardemment, et prie Sainte-Beuve de porter le « coup décisif » — il lui en saura, lui Cousin, un gré infini. Au bas de ce billet, le critique astucieux ajoute : « Je reçois ce mot, je prie Bonnaire de ne pas perdre le fruit de la bonne grâce en trop tardant :

« Ingrate gratia tarda venit. »

En échange de ce coup décisif, voici le fruit de la bonne grâce demandée : « Cousin vous fait un article pour la Revue des Deux Mondes. » Selon lui, ce dernier argument devait l’emporter, et peut-être l’emporta-t-il.

Pourtant, quand cet article est terminé, F. Buloz ne se presse pas de le publier ; le trouve-t-il trop sérieux pour ses lecteurs ? Sainte-Beuve s’inquiète :


« Mon cher Buloz,

« J’ai vu ce matin Ampère, lequel avait vu Cousin, lequel paraissait un peu fâché, ou du moins étonné que l’article qu’il vous a donné n’ait point passé. Je vous le rappelle donc pour cette Revue, c’est un nom à désirer que celui de Cousin, quand l’article ne serait pas très amusant ; c’est d’ailleurs un article non payé[2], mais il paraît désirer une douzaine de tirages à part. Tâchez d’accommoder cela, et de le satisfaire pour les relations futures possibles…[3] »

Sainte-Beuve a écrit : « J’ai éprouvé de la part de Cousin à des époques différentes diverses sortes de procédés, et à une certaine époque, les meilleurs, les plus cordiaux et les plus empressés. »

L’époque des bons procédés, — de 1836-37 à 1840, — c’est l’époque où Cousin, grand maître de l’Université, nomma

  1. V. Cousin à F. Buloz, 1836, inédite.
  2. Cet article devait être le premier que Cousin écrivit pour la Revue, 1er décembre 1836 : Visite à l’École primaire de Harlem.
  3. Inédite.