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craintes très justifiées dans une partie importante de l’opinion anglaise. Souhaitons, à ce propos, qu’une réaction contre les accaparements par l’Etat et contre la cherté croissante de la vie amenée par des causes diverses n’aille pas jusqu’à vouloir renverser trop vite des barrières douanières, qui sont nécessaires pour réaliser la juste répartition des matières premières britanniques entre les Alliés.

La France, je l’ai déjà fait remarquer, n’a qu’un petit nombre de substances à offrir. Cependant, par le retour de l’Alsace-Lorraine, l’une d’elles va se trouver tout particulièrement indispensable à nos ennemis, c’est le minerai de fer. Il est tout indiqué de ne pas laisser sortir une tonne de nos minerais, tant que nos usines du Nord et de l’Est n’auront pas été entièrement reconstituées, et, même alors, de n’autoriser les exportations que dans des conditions permettant à notre industrie métallurgique de soutenir victorieusement la concurrence. On peut en dire autant pour les minerais de nickel dont nous partageons le monopole dans le monde avec le Canada, et pour les phosphates dont, avec les États-Unis, nous détenons les gisements mondiaux les plus importants. On jugera assez naturel également de nous réserver nos bauxites, minerai d’aluminium tout particulièrement avantageux, auquel néanmoins les Allemands peuvent suppléer par des minerais moins riches. Les tendances gouvernementales sont, chez nous, suffisamment orientées vers la fermeture des frontières (peut-être à l’excès) et même vers les monopoles d’État, pour qu’il soit inutile d’insister.

Enfin, il est un grand pays que la prudence nous commande aujourd’hui de considérer comme étant en grande partie sous la dépendance de nos ennemis et qui, cependant, peut nous réserver, un jour ou l’autre, de brusques surprises : c’est la Russie. Je me borne à dire que la Russie détient le monopole du platine (sauf une petite production colombienne) ; qu’elle partage, avec les Indes et le Brésil, celui du manganèse ; qu’elle possède des ressources abondantes en pétrole, considérables en phosphates, et que sa richesse en blé est bien connue.


Nous allons maintenant passer en revue quelques-unes des grandes matières premières, pour lesquelles la lutte