Page:Revue des Deux Mondes - 1918 - tome 46.djvu/680

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

importait, en outre, un supplément de 10 000 tonnes en filés fins venant du Lancashire. L’excédent des importations en Autriche était de 224 000 tonnes, dont une partie venait d’Allemagne.

Quels seraient les moyens pour l’Allemagne de lutter si elle ne réussissait pas à se procurer le coton par l’intermédiaire des neutres ? Le développement des plantations en Mittel-Europa ou dans les colonies qu’on aura pu lui rendre et l’emploi des succédanés. Les deux procédés sont également insuffisants, surtout s’il s’agit, non pas de se fournir à tout prix, mais de concurrencer les manufactures alliées. On peut sans doute produire quelques balles de coton en territoires germaniques. De 1900 à 1905, des essais faits en Hongrie ont permis d’y trouver des terrains favorables à la culture du coton, et celle-ci est également possible en Dalmatie, Bosnie, Herzégovine, Bulgarie et Turquie, au Sud du 45e degré. Les Allemands se vaillent beaucoup des cultures organisées par eux en Turquie d’Asie, dans la plaine de Konia et dont la production est, en effet, rapidement croissante. En 1915, ils disent en avoir tiré plus de 10 000 tonnes. On peut faire plus en employant des graines du Turkestan, en asséchant des marais et en irriguant. Mais les facteurs de main-d’œuvre et de transport sont, de leur aveu même, défavorables. Partout il y a de grands capitaux à immobiliser pour un résultat financier très incertain.

Des colonies africaines, du Togo et de l’Afrique Orientale allemande, l’Allemagne recevait par an de quoi alimenter les filatures allemandes pendant un peu moins d’une journée. Les Pangermanistes prétendent constituer, dans le Centre africain, une production cotonnière qui leur permettrait de devenir indépendants. Mais ils n’occupent pas le Centre africain et, quand ils le tiendraient, la culture du colon n’y est encore qu’à l’état de rêve pour un lointain avenir. Quant à l’Amérique du Sud, elle ne parait pas pouvoir produire avantageusement.

Il faut ajouter que les métiers allemands, construits pour se servir des filés américains, ne peuvent s’adapter aisément même aux cotons égyptiens et hindous : à plus forte raison à ces cotons nouveaux que l’on prétend leur substituer. Tous les cotons sont loin d’être identiques et interchangeables. On ne peut pas faire, par exemple, des tissus légers et fins avec des fils en coton des Indes, dont les fibres sont trop courtes pour