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droit absolu, le droit qu’on a d’être le maître chez soi, — de la bonne volonté qu’elle montre aux Alliés dans cette affaire. Et quelle meilleure, quelle plus profitable occasion de « punir » la Norvège que de se saisir justement de ces mines dont les produits ne sont plus réservés désormais en totalité aux hauts fourneaux du royaume des Krupp ?

Or, quelques jours après avoir reçu la lettre de M. B. G… je lisais, dans les journaux les mieux renseignés sur les affaires des neutres du Nord, que la Finlande, arguant d’affinités ethniques avec les indigènes du Lappland tout entier, donc, du Fin mark norvégien, — se proposait de revendiquer toute la région du Cap Nord, sauf peut-être à offrir en compensation, à la Norvège, le Maan Selka, cette avancée singulière de son territoire vers Tromsô, la langue de terre qui s’étend sur la rive gauche de la Kangâma, affluent de la Tornéa et frontière suédoise.

Mais ce n’est pas seulement la Norvège qui se sent menacée par l’extension inattendue que les Germano-Finlandais donnent aux prétendues réclamations de la nation finno-lapone, — laquelle ne réclame rien, en réalité, et, modeste autant que simple, s’effarouche du bruit que l’on fait autour d’elle : « Du moment que la Finlande, disait ces jours-ci le Stockholm’s Dagblad, médite l’annexion de territoires situés à l’Est et au Nord-Est des frontières de l’ancien duché, sous prétexte que ces régions sont habitées par des Finnois, ne nourrit-elle pas la même ambition du côté de l’Ouest, régions peuplées aussi de Finnois et qui ont toujours fait partie de la Suède ? »

Assurément la Finlande germanisée, qui n’est sans doute pas toute la Finlande, qui est du moins celle qui parle, qui écrit, qui agit surtout, cette Finlande, dis-je, nourrit de telles ambitions. Et peut-être, au fond, devons-nous en être satisfaits. Ne faut-il pas que les Suédois voient bien où les a conduits leur confiance dans l’amitié allemande ?


Que l’on ait tout de suite pensé, — dès 1914, en fait, — à utiliser la précieuse propriété de la côte mourmane de rester toujours libre de glaces soudées, pour créer, par le Nord de la Russie, l’Arctique et l’Atlantique, la ligne de communications permanente avec les Alliés d’Occident que ne procurait pas la