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Suède, que cette revendication du « Lappland intégral » par l’ingrate Finlande germanophile. Qu’arriverait-il si cette revendication prenait une forme officielle, soutenue qu’elle serait, nécessairement, par l’Allemagne ? La Suède ne serait-elle pas, alors, obligée de faire front vers le Nord, en même temps qu’à l’Est, — et tout près de Slockholm ! — à cause des iles Aland, en même temps qu’au Sud, parce que sa riche Gothie n’est qu’à 100 milles de la côte allemande ? Et ne vient-on pas d’apprendre, justement, que l’Etat-major de Berlin renforce son escadre et ses flottilles de la Baltique ?


Les desseins de nos ennemis étaient sans doute connus depuis longtemps des gouvernements de l’Entente. Un « leader article » du Temps, du mois de juillet, nous apprend que M. l’ambassadeur Noulens avertissait le nôtre, à la date du 14 avril dernier, des visées allemandes sur le Nord de la Russie et de l’intérêt pressant qu’il y avait à se jeter à la traverse[1].

Il faut reconnaître que l’on a tenu compte des avis ainsi donnés ; avec quelque retard, toutefois. Nous sommes au mois d’août et s’il est vrai que, justement en raison des propriétés signalées plus haut du littoral mourman, l’obstacle des glaces ne doive pas entrer en ligne de compte, s’il l’est même qu’à certains égards la marche d’une troupe armée dans les difficiles fondrières du Lappland et de la Carélie soit plus sûre en hiver qu’en été, il n’en existe pas moins de sérieuses raisons, — la brièveté très grande des jours et la rigueur extrême du froid, dès que l’on s’éloigne de la côte, par exemple, — de souhaiter que les Alliés arrivent à un résultat avant le fort de la saison hivernale.


Mais, en fait, quel résultat les Alliés veulent-ils atteindre ? Quel est leur objectif précis ? Quelle est, dans l’esprit des dirigeants de l’Entente, la portée de l’expédition qui commence et quelles sont les limites que cette expédition ne doit pas dépasser ?

On pense bien que je n’ai pas les moyens de répondre à de

  1. Je prends la liberté de signaler que j’avais traité sommairement la question qui nous occupe, dans la presse quotidienne, dès la fin de novembre 1917 et, plus complètement, dès le 11 janvier 1918, dans la France de Bordeaux et du Sud-Ouest.