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offensive était capable d’obtenir la rupture partout où on la voulait. Il est vrai que cette rupture n’avait pas la prétention de forcer l’assaillant à la bataille en rase campagne. Mais elle conduisait à la manœuvre en créant chez l’adversaire un flanc vulnérable dont il ne pouvait se dégager qu’en s’alignant de nouveau en arrière. Des coups simultanés portés avec vigueur aux divers points sensibles de la ligne ennemie étaient susceptibles de donner indirectement plus de résultats que les larges attaques précédentes, si coûteuses en hommes et en munitions.

Le succès venait aussi bien de la minutieuse préparation d’artillerie que de la tactique heureuse de l’infanterie, des chars d’assaut et de l’aviation. C’était surtout la liaison intime entre ces armes qui vivifiait l’organisme en marche, lui infusait un sang nouveau, le rendait assez souple pour se plier aux circonstances diverses de la lutte. L’instrument offensif forgé par le commandement français promettait d’être efficace.


L’AVÈNEMENT DE LA « SURPRISE. » — LA BATAILLE DE CAMBRAI

À cette notion particulière de la victoire vint, en outre, s’ajouter la notion de la surprise. Le char d’assaut permettait à l’infanterie de détruire les obstacles secondaires qui arrêtaient sa progression. Par lui étaient résolues les difficultés de transport du canon d’accompagnement et de son ravitaillement. D’autre part, le char d’assaut écrasait les réseaux de fils d« fer ouvrant le passage à l’infanterie ; sa masse et sa puissance de feu rendues plus redoutables par sa mobilité produisaient un effet de désarroi sur la troupe ennemie. L’attaque de Cambrai démontra nettement qu’il était l’instrument par excellence de la surprise. Le 20 novembre, une ligne de tanks amenés à pied d’œuvre à la faveur du brouillard se lançait, sans qu’aucune préparation d’artillerie, sans qu’aucun mouvement suspect de troupes eussent donné l’éveil, à l’assaut des positions allemandes. Les fantassins qui suivaient ces mastodontes n’eurent qu’à cueillir les fuyards. Dans toute la première position, en dehors des garnisons frappées de stupeur, nulle troupe ne s’opposa à l’attaque. Quelques tentatives de résistance ébauchées sur les positions successives furent vaines. Vers le soir seulement, alors que l’avance des Britanniques dépassait 9 kilomètres, les éléments d’une division au repos dans la