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est repris; le général Rawlinson a passé la Somme, et soude vers Marchelepot ses divisions aux nôtres. Celles du général Debeney ont bordé, puis franchi le canal du Nord, à hauteur de Guiscard. Le général Humbert a libéré et décongestionné Noyon. L’armée Berthelot chasse l’ennemi des hauteurs boisées qu’il occupait entre l’Aisne et la Vesle. Par-delà l’Ailette, jusque sur l’Oise et jusque sur l’Aisne, Mangin secoue, avec la froide et tenace violence que l’obstacle irrite, loin de l’user, le gond méridional de la porte derrière laquelle l’État-major impérial s’était réservé de recoller les morceaux déchirés de ses plans. Lentement, péniblement, mais irrésistiblement, il gravit, par Crouy, Cuffies et Juvigny, le plateau de Terny et de Vauxaillon. Il se glisse par les bois, sous Coucy-le-Château ; par les-vallées du côté de Chauny et de Vailly, il s’apprête à happer dans sa mâchoire de fer cet autre noyau, plus dur encore à investir et escalader, cette vaste forteresse naturelle, ce donjon central, cette rocca du Boche en France, le grand massif de Saint-Gobain. Là sont les clefs de la Fère, de Laon, de Reims. On serait tenté de dire : là, l’ennemi, s’il est bousculé, et nous si nous le chassons, nous ferons vraiment le premier pas, lui en arrière, nous en avant, vers la frontière. En attendant; le général. Mangin attire, accroche et retient les unités les plus réputées de l’armée allemande, des divisions à la douzaine, les restes les meilleurs de la garde prussienne, la crème des régiments bavarois et saxons, le corps des Alpes.

Il fait mieux encore : il force l’ennemi à battre en retraite. Aux dernières nouvelles, — et il est certain que, quand ces lignes leur passeront sous les yeux, nos lecteurs nous trouveront en retard de nouveaux et importants progrès, et peut-être même d’une nouvelle victoire, — aux dernières nouvelles, l’Allemand se replie sur tout le front de l’Ailette. Si sobres que s’efforcent d’être nos communiqués, l’un des derniers, que nous ayons sous les yeux a une allure véritablement, triomphale : « L’ennemi, épuisé par les durs combats qui se sont déroulés depuis le 20 août, a commencé aujourd’hui, vers quinze heures, à lâcher pied devant nos troupes. » Nous occupons Coucy-le-Château, Coucy-la-Ville, une grande partie de la basse forêt de Coucy, où les Allemands ont dû abandonner un matériel et des dépôts de munitions considérables; nous avons pris Vregny; Sancy, Laffaux sont menacés. Le massif de Saint-Gobain est entamé : nos troupes y ont pénétré largement. Nous touchons à l’extrémité Ouest du Chemin des Dames, où, vraisemblablement les Allemands ne pourront se maintenir... Et pendant ce temps la pensée de