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constitutions de l’empire et des États sont soumises à une refonte complète. Il appartient aux Alliés de l’exiger. Dans tous les pays de l’Entente les constitutions ont été établies par les représentants des citoyens. Dans les États allemands elles ont été octroyées par les souverains à leurs sujets et, à l’heure présente, les concessions que ces souverains font à leurs peuples, sous la pression d’événements tragiques, ne changent rien au principe du pouvoir, non pas délégué régulièrement par les gouvernés, mais appartenant en propre à des dynasties, qui en délimitent elles-mêmes les prérogatives et en règlent l’exercice. Il y a donc opposition presque irréductible entre les principes qui dominent la vie nationale des démocraties de l’Entente et les autocraties des empires centraux.

Il faudra dès lors exiger, avant tout traité de paix, que les États germaniques élisent des constituantes et se donnent des statuts nationaux conformes à ceux des autres peuples. L’empire lui-même est sorti d’une convention passée entre les princes. Il devra également, s’il doit subsister, recevoir la consécration populaire. Il appartiendra aux États allemands préalablement démocratisés de décider s’ils veulent maintenir la Confédération actuelle ou s’ils préfèrent sortir du groupement dont la Prusse s’était assuré l’hégémonie.

Les Alliés apporteront ainsi la liberté aux peuples allemands. Que si ceux-ci veulent maintenir leur confiance à leurs dynasties, libre à eux de le faire. Encore ces dynasties devront-elles accepter les limitations de pouvoir que leur imposeront les constituantes. Voilà, à mon avis, la seule manière dont il sera possible de doter d’institutions libres des pays où jusqu’ici l’ambition démesurée des Hohenzollern et des Habsbourg s’était imposée à des races dont la passivité était justement légendaire, mais auxquels la banqueroute du militarisme prussien permettra de s’affranchir d’une séculaire servitude.


E. WETTERLE.