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les seules, et les plus minimes parties d’elle-même que l’Amirauté britannique prêta à la force nouvelle, en se la subordonnant.

Le service fut organisé par port. Entre eux se partagea la surveillance des zones maritimes, dans chacun d’eux fut établie une autorité d’information et de commandement rapides, pour maintenir l’ordre au large, connaître l’approche des navires amis, leur signaler les routes sûres et les suspectes, apprendre les tentatives de l’ennemi, les succès, les sinistres, recevoir les demandes de secours, envoyer a l’instant et à la place nécessaires, et par groupes d’avance prêts, les chalutiers à leur tâche, sous la protection des destroyers et l’occulte surveillance des sous-marins.

Cette muette et infatigable activité se déroule dans La guerre sur mer. Un créateur de rêves s’est fait un observateur de réalités, un poète est devenu un historien. Il ne renonce pas à sa nature en se donnant à une tâche nouvelle. Pour lui, connaître est moins savoir que voir. Il a recueilli dans les rapports de service les faits les plus authentiques et les plus dignes d’être retenus. Il a mené, tour à tour sur des chalutiers, des destroyers et des sous-marins, chacune des existences qui sont celles des hommes. De là des récits vrais comme des témoignages et vivants comme des tableaux. Et tous concourent à répandre, à renouveler, à affermir cette émouvante certitude : aucune des guerres antérieures n’avait imposé un seul jour aux plus célèbres de ses héros les épreuves devenues, depuis quatre années, la vie continue des marins qui soutiennent, subalternes obscurs, la présente guerre.

Avant les derniers progrès du génie homicide, toutes les armes, même l’artillerie, habile à frapper de plus en plus loin, de plus en plus vite et de plus en plus fort, étaient soumises à une condition commune : pour s’avancer à la distance où elles devenaient efficaces, elles devaient, sur terre ou sur mer, poursuivre à découvert leur marche d’approche. La vigilance du regard suffisait à étendre autour de l’homme, tant qu’il les voyait hors de portée, une région de quiétude. L’attaque agissait de plain-pied, elle ne surprenait pas, elle laissait du temps. Voilà les trois sûretés que les nouveaux engins bannissent de la guerre. Désormais l’attaque vient non seulement sur la surface du sol et des flots, mais par-dessus les nuages et par-dessous les