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germaniques étaient nettement prises avant que l’Entente ait décliné l’offre obligeante des Soviets de participer aux négociations de la paix amicale, « sans annexions ni indemnités. » Ce fut une pitrerie de plus, et fort pitoyable, des chefs de la majorité du Reichstag, de prétendre que cette abstention avait seule dégagé leur loyauté bien connue des engagements pris par eux le 19 juillet.


IV

La conscience allemande est ainsi faite, ou ainsi dressée par ses éducateurs, qu’elle croit imperturbablement aux vertus morales de sa race et s’étonne, avec une désespérante candeur, que personne d’autre ici-bas ne lui fasse confiance. « Il y a, disait tout récemment un ministre anglais à la Chambre des Communes, d’un côté la nature allemande, de l’autre la nature humaine. » Cela, les Huns ne l’admettront jamais. Pourtant leur propre histoire, au cours du premier semestre de 1918, suffirait, à soi seule, à en administrer la preuve.

Lorsque s’ouvrit cette période, le chancelier Michaëlis était déjà tombé sur un médiocre incident de séance, mais déjà aussi les conservateurs poursuivaient une campagne insidieuse contre le secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, M. de Kühlmann, qui leur était suspect d’être plus diplomate qu’homme de main. L’habileté du nouveau chancelier, le comte Hertling, ne suffit pas longtemps à protéger les victimes des haines pangermanistes : c’est de n’avoir pas assez fait pour la grandeur allemande qu’on les accusa bientôt ; les traités dont on a donné plus haut la substance furent représentés, non pas comme contraires à la politique du 19 juillet, mais comme trahissant les intérêts que celle-ci paraissait avoir éliminés.

Et pourtant, les faits furent nombreux, dans ces premiers mois de 1918, qui eussent dû éveiller la conscience allemande, si seulement elle eût été susceptible de remords, à une plus claire et plus équitable conception des réalités historiques et des véritables responsabilités ertsgées dans la guerre. On eut alors presque coup sur coup la révélation des instructions données en août 1914 par M. de Bethmann-Hollweg à son ambassadeur à Paris ; les aveux du prince Lichnowski sur les trafics de son gouvernement à Londres, ceux de M. Muelhon sur