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depuis plusieurs heures ou plusieurs jours, et plus rarement pendant la période descendante du V renversé, par suite d’une imprudence, d’une sortie prématurée, d’une prédisposition, d’autres causes mal connues se déclenchent soudain des complications terribles affectant presque exclusivement l’appareil pulmonaire et qui mettent en danger la vie du malade : c’est la congestion pulmonaire, la pneumonie, ou la pleurésie purulente, c’est quelquefois l’une et l’autre qui, sévissant tout à coup dans un organisme que la crise grippale a laissé anémié et en état de moindre résistance, s’emparent de sa faiblesse et trop souvent, hélas ! lui donnent le coup de grâce.

En un mot, ce qui rend la grippe dangereuse, ce n’est pas la grippe elle-même, ce sont les complications broncho-pulmonaires à qui elle ouvre la porte et qui germent soudain aux sillons qu’elle a creusés dans l’organisme. Je ne sais plus quel auteur disait jadis avec beaucoup de vérité : « La grippe condamne et la surinfection exécute. » Et de là découlent immédiatement une série de règles d’évidence que nous indiquerons et qui visent à empêcher les complications de surgir dans le sillage de la grippe. Continuons d’abord à regarder ce qui se passe et tâchons à le comprendre.

Le microscope, — ce télescope des mystères infiniment petits, — s’est attaché à son tour à surprendre les secrets des phénomènes dont nous venons de faire le rapide tableau. Dans les expectorations des grippés compliqués, dans le pus de leurs poumons, dans les coupes qu’on faisait à l’autopsie de leurs lésions pulmonaires, on a trouvé depuis longtemps différents microbes et notamment dans presque tous les cas, — et lorsque la technique bactériologique était bien faite, — trois microbes généralement associés : le pneumocoque, agent bien connu de la pneumonie, le streptocoque, agent de beaucoup d’infections purulentes, et enfin le cocobacille de Pfeiffer qu’on retrouvait presque toujours et qu’on a longtemps, et jusqu’à ces dernières semaines, considéré comme l’agent initial de la grippe elle-même. La présence de pareilles associations microbiennes est constatée dans beaucoup de maladies infectieuses. C’est ainsi que le bacille spécifique du tétanos ne peut produire cette maladie qu’à condition d’être associé à certaines autres espèces microbiennes, en l’absence desquelles il est impuissant. Même dans la société bactérienne, l’union fait la force.

Quoi qu’il en soit, jusqu’à l’épidémie actuelle, le rôle respectif des trois microbes susnommés, dans les complications grippales, n’était pas bien élucidé et l’on vivait sur l’opinion généralement admise et