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pour le maintien de la paix ne se rapproche-t-elle pas beaucoup de l’idée d’une Société des Nations telle qu’elle a été lancée par le président Wilson ?

« Une société générale des nations sera formée en vertu d’accords spéciaux de nature à fournir des garanties mutuelles d’indépendance politique et d’intégralité territoriale aux petits comme aux grands Etats. » Tel est le texte de l’article 54 du « Programme de la paix du monde, » en date du 10 janvier de cette année.

Nous n’avons pas ici à examiner au point de vue philosophique l’idée même d’une Société des Nations, non plus qu’à en discuter les conditions générales d’établissement et d’organisation : une telle discussion dépasserait de beaucoup notre compétence. Nous nous plaçons au point de vue militaire, uniquement soucieux des garanties de la paix et de notre propre défense nationale. C’est dans cet intérêt supérieur que nous voudrions, selon le mot qu’employait M. Charles Benoist dans sa dernière chronique, aider la future Société à « descendre des nuées et se poser sur la terre. »

Notons que les mots « Société, » « Association » supposent la poursuite d’un but commun, la conclusion entre les associés d’accords pour atteindre ce but, l’existence des sentiments de confiance mutuelle nécessaires pour assurer la validité de ces contrats. Il est donc clair que, de prime abord, la Société des Nations devra être constituée par les Puissances qui, ayant établi dans le monde un certain ordre de choses, seront directement intéressées à son maintien. Elle ne peut être constituée autrement.

Dans ce sens, dans cette première conception limitée, la Société des Nations existe dès maintenant. Elle est constituée de fait par les Puissances de l’Entente dont le groupement a attiré à lui, pendant la guerre même, une grande partie du monde civilisé.

Les obligations imposées par les besoins de la guerre ont permis de résoudre, pour la formation de cette Société, bien des difficultés dont, en temps de paix, les amours-propres nationaux ou les intérêts particuliers auraient peut-être retardé indéfiniment la solution. Les armées des Puissances de l’Entente ont été réunies sous un commandement unique. Les accords militaires ont entraîné à leur suite toute une série