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plus de 800 sanitaires (48 sections), environ 200 R. V. F. (27 sections), puis toutes sortes de voitures des services des armées : camionnettes des courriers, du génie, de l’artillerie, de l’aviation, de l’aéronautique, du camouflage, auto-canons, auto-projecteurs, camions de la télégraphie, de la radiotélégraphie, de la géodésie, de la photographie, etc. qu’il fallait bien laisser circuler au milieu de tous les autres !

Or, la route, — on avait été obligé de la prendre telle qu’elle était ! — avait, dans les meilleurs endroits, 7 mètres de largeur, et on ne put jamais l’élargir davantage ! Dans ces conditions, si l’on y avait laissé passer les chevaux, c’était l’arrêt fatal de tout !

Et puis, le temps, aussi, était contre nous !

Il y a un mot des poilus qui est bien vrai :

— En été, disent-ils, on se f… de tout !

C’est qu’en effet, en été, tout est singulièrement facilité et, à quelque point de vue qu’on se place, en dehors de celui de la marmite, la guerre, en été, est très différente de ce qu’elle est en hiver.

Cela commença, le 21, par une effroyable boue ; puis, dès le 25, la neige couvrait tout ; elle fondit, elle regela, ce qui produisit une espèce de carapace glissante qui vint ajouter aux mille difficultés déjà existantes. Enfin, n’oublions pas que beaucoup de convois, et, en particulier, ceux de l’avant, devaient se faire de nuit, sans aucune lumière.

Tout s’organisa, cependant, en quelques heures ; et c’est alors que la « Voie Sacrée » prit cet aspect extraordinaire, qu’elle devait conserver pendant plusieurs mois et que ceux qui l’ont vue ne sauraient jamais oublier.

« Le tableau de l’attaque de Verdun qui restera toujours gravé dans ma mémoire est celui de la grande route au Nord de Bar-le-Duc, couverte de neige et de glace, constamment remplie de deux colonnes de camions : les uns allaient vers le Nord, les autres vers le Sud, et ils se balançaient avec une démarche titubante comparable à celle de jeunes éléphants. Il