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houille. Toutefois, lorsqu’on aborde des solutions aussi grandioses que les précédentes, on se trouve en présence d’une difficulté sociale qu’on ne saurait passer sous silence. La centrale, qui alimenterait ainsi tout une région, détiendrait un tel monopole de fait qu’on est conduit à envisager en même temps l’intervention de l’Etat, tout au moins sous la forme de commissaires fixant les prix de vente maxima, les dividendes, l’organisation du capital, ou même à admettre l’organisation de centrales nationales. Or, s’il est, à l’extrême rigueur, possible d’attribuer à l’Etat le contrôle ou la vente de l’énergie électrique une fois produite, on ne saurait lui confier les opérations antérieures si délicates qui commencent à l’exploitation de la mine pour se continuer par la direction d’une usine à gaz, avec production du coke, fabrication de matières colorantes, etc. Chacune des avenues qui conduisent à la centralisation moderne nous fait ainsi apercevoir à son terme la figure inquiétante du socialisme d’Etat.


LE LIGNITE ET LA TOURBE

Tirer par les méthodes précédentes un profit avantageux d’une bonne houille, c’est, nous dirait Molière par la bouche d’Harpagon, à peu près aussi facile que de faire bonne chère avec beaucoup d’argent. L’ingéniosité provoquée par la vie coûteuse conduit de plus en plus à consommer également en industrie de mauvais combustibles. Le lignite ne peut pas être très appliqué en France, faute de gisements importants ; nous aurions toutefois quelques leçons à prendre en Allemagne, où son extraction a pris un grand développement, en raison des facilités que ses principaux gisements y présentent pour une exploitation à ciel ouvert par des procédés mécaniques. Quand un tel système est applicable, on arrive à produire, par ouvrier, quatre fois plus de lignite qu’on n’obtiendrait de houille et, dans certains cas, la proportion est même de sept à un. Le combustible obtenu n’a, il est vrai, qu’une valeur calorifique inférieure dans la proportion des deux tiers. Néanmoins, l’ouvrier extrait encore presque trois fois plus de calorique dans une carrière de lignite que dans une mine de houille, et cet avantage s’est trouvé sensiblement accru pendant la guerre par le manque de bons ouvriers, qui prêtait un intérêt particulier