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Cet extraordinaire rétablissement de l’Angleterre d’il y a cent ans, avons-nous bien le droit d’en proposer le témoignage comme un « précédent, » et de tirer de ce « précédent, » avec, une leçon, des conclusions favorables pour l’avenir de notre pays ? Entre les luttes européennes d’autrefois et la guerre mondiale d’aujourd’hui, tout rapprochement n’est-il pas vain, même du seul point de vue économique et financier ? Nul doute que les pertes subies alors par les Anglais en vies, en biens, en argent, ne nous apparaissent bien modiques, un siècle après, en chiffres absolus ; et pourtant on ne saurait nier que la charge finale et totale de la guerre contre la France n’ait pesé d’un poids extrêmement lourd sur le pays, eu égard à ce qu’étaient alors ses moyens et ses ressources, et. que l’effort nécessaire pour supporter cette charge n’ait été, en proportion de ce qu’étaient ses forces, assez comparable à celui que nous devons nous préparer à faire actuellement en vue de la liquidation de la guerre : cet effort, l’Angleterre l’a fait, elle nous a montré ce qu’une nation résolue et fière peut faire sans y succomber, et c’est toute la conclusion que nous voutions faire ressortir ici. D’autre part, on peut dire qu’il y a un siècle, le temps de l’après-guerre ayant coïncidé avec la grande période d’éveil de l’industrie moderne, les conditions économiques ont favorisé chez nos voisins de façon exceptionnelle l’effort financier. L’Angleterre a été sauvée par Watt, Arkwright et leurs émules. C’est la « révolution » industrielle qui, multipliant avec la production les ressources, a permis au pays de supporter les charges de la guerre. La leçon à en tirer, c’est qu’il faut qu’une « révolution » analogue, autre dans ses moyens, mais pareillement féconde, se produise demain chez nous dans le domaine de la production comme dans celui de l’exploitation des richesses naturelles. Qu’il nous suffise de dire ici qu’une telle « révolution » est à la fois nécessaire et possible, et que dans une certaine mesure elle a déjà commencé…


II

Pour juger de l’effort nécessaire au relèvement de la France, pour savoir même simplement où nous en sommes de nos affaires, il faudrait d’abord mesurer les pertes qu’a subies le pays du fait de la guerre. Dans quelle proportion sa richesse