Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/387

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

La nue est remuée, et calme la prairie ;
L’orage étend au loin son roucoulant fracas
Empli de passion houleuse, endolorie,
Qui se perd dans les monts altiers, et leur transmet
Cette sombre, puissante et grave rêverie
Comme un baiser donné par l’espace aux sommets…


INTERROGATION


O monde, mon regard où l’âme se condense
Attache sur vos cieux azurés ou nocturnes
Cette immense prière ailée et taciturne
A qui vous ne rendez jamais que le silence.

Qu’importe ! Ai-je besoin, pour goûter l’avenir,
Que le sublime chant des astres argentés
Me livre le secret des vastes vérités ?
Je sais que tout sera, que rien ne peut finir.

Et je sens que l’espace avec mansuétude
Accueille mon regard que l’étendue obsède.
O monde, dont jamais mon cœur n’a l’habitude,
C’est par l’étonnement que l’homme vous possède !


DANS L’ADOLESCENCE


Je me souviens d’un jour de ma seizième année,
Où malade et pensant mourir
Je sentais s’installer sur mon âme étonnée
Le destin qui fait obéir.

Du fond de ma douleur physique et terrassante,
Qu’un médicament apaisait,
J’entendais soupirer ma mère pâlissante
Qui pleurait et qui se taisait.