Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 51.djvu/700

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

héros de chez nous. Il raconte à M. Pierre Benoit son aventure. Un soir, le régiment s’est emparé d’un prisonnier. Ce prisonnier s’appelle Ulrich de Boose… Ulrich de Boose, l’assassin du grand-duc Rodolphe !… Il faut que Vignerte le voie. Et l’on va chercher Vignerte. Il vient : mais, quand il n’est plus qu’à peu de distance, un obus le tue. Le roman de l’Atlantide nous conduit au centre du désert africain. L’on a lu probablement le Cvitias ou, du moins, le seul fragment qui reste de ce dialogue ; et l’on sait que l’Atlantide, selon la croyance des Grecs, était une île depuis longtemps disparue. Deux officiers français, le capitaine Morhange et le lieutenant Saint-Avit l’ont retrouvée. C’est leur expédition que raconte M. Pierre Benoit. L’Atlantide, nos deux compatriotes l’ont retrouvée au centre de l’Afrique, passé le pays des Touaregs. Une île, au centre de l’Afrique ?… Il n’est pas interdit de croire que le Sahara fut, en son jeune temps, une mer : il n’est pas interdit de supposer qu’au milieu de cette eau l’île avait, comme on dit, sa place au soleil. Seulement, l’eau s’est retirée. Le sable a moins de routes encore que la mer : et l’on cessa, voici plusieurs milliers d’années, d’aller à l’Atlantide. Ce n’est plus maintenant qu’un château formidable, où demeure la descendante de Neptune, Antinéa, belle d’une beauté surprenante et qu’il est impossible d’oublier quand on l’a vue : « Une sorte de jeune fille mince, aux longs yeux verts, au profil d’épervier. Un Adonis plus nerveux. Une reine de Saba enfant, mais avec un regard, un sourire comme on n’en a jamais vu aux Orientales. Un miracle d’ironie et de désinvolture. » Elle a des lettres ; et des livres d’autrefois ou récents traînent auprès d’elle. Or, elle en prit un, qu’elle ouvrit au hasard : « C’est l’indicateur des chemins de fer de l’Ouest, dit-elle. Quelle lecture admirable, pour quelqu’un qui ne bouge pas ! Il est cinq heures et demie du soir. Un train, un train omnibus, est arrivé, il y a trois minutes, à Surgères, dans la Charente-Inférieure. Il en repartira dans dix minutes. Dans deux heures, il arrivera à La Rochelle. Comme c’est bizarre, ici, de songer à ces choses ! Tant de distance… Tant de mouvement ; tant d’immobilité !… » Elle est charmante. Elle a d’autres passe-temps. Un vieux sacripant, Cegheïr-ben-Cheïkh se promène aux alentours de son royaume et lui amène les explorateurs français, anglais, italiens et de toute nationalité, qu’il rencontre et qui lui paraissent dignes de complaisance. On les nettoie. Antinéa les agrée ou les refuse. Ceux qui l’ont vue ne l’ont pas oubliée. Mais ils n’ont rien dit. Rare discrétion d’un voyageur et d’un amant !… C’est qu’ils ne sont pas revenus. Les amants de la