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M. KIobukowski, ministre de France, affirmait à M. Davignon les intentions pacifiques de son gouvernement.

On croyait avoir tout lieu d’être également tranquille du côté de l’Allemagne. On se rappelait l’énergie particulière avec laquelle, en 1905, le représentant de la Prusse, M. von Waltwitz, avait affirmé les sentiments de sa patrie à notre égard. « C’est, avait-il dit à Anvers dans son toast du 28 juillet, une Belgique forte que nous désirons, tant au point de vue politique qu’au point de vue commercial. En passant, je puis dire que pour nous, Allemands, le maintien du traité de garantie conclu à la naissance de la Belgique actuelle est une espèce d’axiome politique, auquel nul ne saurait toucher sans commettre la plus grave des fautes. » Il empruntait l’expression à Gladstone.

La convention de la Haye du 18 octobre 1907, à laquelle le plénipotentiaire de l’Allemagne avait apposé sa signature, s’exprimait comme suit :


ART. 1. — Le territoire des Puissances neutres est inviolable.
ART. 3. — Il est interdit aux belligérants de faire passer à travers le territoire d’une Puissance neutre des troupes ou des convois, soit de munitions, soit d’approvisionnements.


En 1911, lorsque le projet hollandais de fortifier Flessingue suscita des alarmes dans une partie de l’opinion et que des journaux exprimèrent la crainte que, dans le cas d’une guerre avec la France, l’Allemagne ne respectât pas la neutralité belge, le chancelier de l’Empire, M. von Bethmann-Hollweg, avait cru devoir rassurer la Belgique : « L’Allemagne, disait-il, n’a aucune intention de violer la neutralité belge ; seulement, ajouta-t-il, avec une réserve dont l’avenir devait nous dévoiler la portée, elle ne peut pas le déclarer publiquement sans affaiblir sa position militaire vis-à-vis de la France, qui, déchargée de toute inquiétude pour sa frontière septentrionale, pourrait concentrer toutes ses forces dans la région de l’Est. »

La Prusse, même, affectait des scrupules à l’endroit de notre neutralité, comme les vieilles duègnes chargées de surveiller la vertu fragile de quelque jeune beauté. En 1900, elle n’avait pas voulu que nous eussions une garde belge en Chine contre les Boxers : « c’était contraire à notre neutralité. » En 1911, M. von Kiderlen se plaignait au baron Beyens de ce qu’à