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furent-elles incommodées à leur tour par les gaz ? L’invention n’ëtait-elie pas assez perfectionnée encore pour que le transport et l’installation des récipients pussent s’effectuer à temps sur de nouvelles lignes ? Le haut commandement français[1] fit front, quoi qu’il en soit, avec une remarquable rapidité. Ce fut la première et non la moins brillante de ces opérations de « colmatage » où nous devions passer maîtres au cours de cette guerre. Dès le troisième jour de l’offensive, l’ennemi était arrêté et une lutte pied à pied s’engageait entre lui et nous pour la reprise du terrain qu’il nous avait enlevé. Comme on savait depuis assez longtemps que les Allemands songeaient à employer les gaz, l’antidote avait été cherché et presque tout de suite nos troupes furent pourvues de tampons d’ouate hydrophile qu’elles devaient mouiller au premier signal et s’appliquer sur la bouche avec les bandes de leur pansement individuel. Les fusiliers, dès le 24, reçurent de ces tampons, qu’on remplaça peu après par des masques. La nouvelle de l’attaque allemande par gaz asphyxiant ne les avait pas autrement « impressionnés, » bien que le tapage fût « infernal » dans l’Ouest. « Ici, c’est calme, écrivait Luc Platt le 24 avril. Mais sur notre gauche, vers Ypres, le ciel est rouge d’incendies, et des lueurs fulgurantes jaillissent : ce sont les coups de canon et les obus qui éclatent. Que doivent-ils prendre, ceux qui sont là-bas ? Les bruits les plus extraordinaires circulent au sujet de prétendues pertes et de prétendus gains [de nos troupes]. C’est pour occuper l’esprit. » La bataille en effet ne s’étendit pas jusqu’à nous, mais nous en eûmes pourtant le ricochet et, dans Taprès-midi même du 24, l’aviation nous prévint que des gros de troupes se dirigeaient vers le pont de l’Union. L’amiral envoya aussitôt le 1er bataillon à Nieuport pour y renforcer, à la Briqueterie et au Boterdyck, le 6e territorial. Il était environ 6 heures du soir. L’attaque semblait proche, car l’ennemi exécutait un violent tir de barrage par 420, 350 et 11 sur Nieuport, les Cinq-Ponts et surtout les ponts Albert et Elisabeth. Mais, à 8 heures, tout cessait et le 1er bataillon revenait à minuit au cantonnement.

On était à peine remis de cette alerte qu’on apprenait que Dunkerque, qui était à plus de 35 kilomètres du front, venait

  1. Général Putz, général d’Urbal, général Foch.