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tout ce qu’on nous dit, ou ce serait tout, si ce qu’on ne dit pas n’en disait davantage, en établissant une distinction entre « les anciens territoires autrichiens attribués à l’Italie dès maintenant » et ceux qui lui seront attribués « en vertu des délimitations de frontières auxquelles il sera ultérieurement procédé. » Dans l’espèce, il ne s’agit pas seulement de distinguer, sur la carte, par un trait plein ou par un pointillé. Au moins n’est-ce pas le pointillé ordinaire. D’un point à l’autre de celui-ci, il y a, on ne veut pas dire un abîme, mais toute une série de fossés. Rien n’indique qu’ils aient été encore ou comblés ou sautés.

Les Turcs, qu’on avait fait venir de Stamboul pour les promener de Vaucresson à Jouy-en-Josas, ont été renvoyés chez eux, incertains de retourner vraiment « chez eux » et d’avoir vraiment un « chez soi. » Nous ne savons pas quand on les rappellera. En revanche, les logements des Bulgares ont été retenus dans un autre coin de la banlieue parisienne, et l’on a eu l’idée ingénieuse de charger l’Italie d’arbitrer le différend qui, en Macédoine et en Thrace, subsiste entre eux et les Grecs. Au total, une paix sur quatre est signée et ratifiée. Une autre est à la signature. La troisième et la quatrième sont toujours en préparation. Mais, elle-même, la paix signée et ratifiée est-elle une paix parfaite, au sens de « tout à fait » faite ? Comment n’être pas frappé, et inquiet, presque effrayé de ce qui y manque : alors que toute l’Europe a été engagée dans la guerre, une moitié de l’Europe, celle par laquelle cette guerre a commencé, est absente de la paix. Dans le traité de Versailles et ses annexes, la Russie n’apparaît qu’en quelques courts paragraphes des articles 116 et 117 du Traité : « L’Allemagne reconnaît et s’engage à respecter, comme permanente et inaliénable, l’indépendance de tous les territoires qui faisaient partie de l’ancien Empire de Russie au 1er août 1914. » — « L’Allemagne reconnaît définitivement l’annulation des traités de Brest-Litovsk, ainsi que de tous autres accords ou conventions passés par elle avec le gouvernement maximaliste en Russie. Les Puissances alliées et associées réservent expressément les droits de la Russie à obtenir de l’Allemagne toutes restitutions et réparations basées sur les principes du présent Traité. — L’Allemagne s’engage à reconnaître la pleine valeur de tous les traités ou arrangements que les Puissances alliées et associées passeraient avec les États qui se sont constitués ou se constitueront sur tout ou partie des territoires de l’ancien Empire de Russie, tel qu’il existait au 1er août 1914, et à reconnaître les frontières de ces États, telles qu’elles seront ainsi fixées. »