Page:Revue des Deux Mondes - 1919 - tome 54.djvu/722

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entier l’évolution des sociétés ; elle a abouti à ce résultat que bien des questions qui auraient mûri au cours des années passent au premier plan, et que d’autres qui seraient venues beaucoup plus tard occuperont demain l’esprit public. L’histoire ne s’arrête pas. Ce que nous en disons n’est pas pour diminuer les espérances que les élections font naître : c’est au contraire pour qu’elles donnent tout ce qu’il est légitime d’en attendre. La Chambre nouvelle a besoin de sentir à la fois qu’elle peut compter sur le crédit de l’opinion et qu’elle doit elle-même se mettre méthodiquement à l’ouvrage. Devant le monde entier, elle a attesté par sa seule apparition le désir de la France d’assurer la paix et le travail : il n’y a pas de plus belle mission que d’être l’exécutrice fidèle de cette volonté de la nation.


Le 11 novembre, date anniversaire de l’armistice, M. le Président de la République était l’hôte de Londres, où avec Mme Poincaré il rendait visite aux souverains d’Angleterre. La réception qui lui a été faite dans la capitale britannique a été grandiose à la fois par l’éclat des cérémonies auxquelles les coutumes anglaises donnent tant de magnificence et par l’enthousiasme du peuple. Partout où a passé M. le Président de la République, à Douvres, dans la Cité, à Glasgow, il a reçu l’accueil le plus enthousiaste et le plus émouvant. Les années de souffrances et de gloire communes ont fait de l’entente Franco-anglaise, qui a été d’abord l’œuvre des gouvernements, une réalité plus profonde et une amitié qui est aujourd’hui sentie par les nations elles-mêmes. La Grande-Bretagne a accompli pendant les hostilités un prodigieux effort qui fera l’admiration de l’histoire. Elle a mis les immenses ressources de l’Empire à la disposition des Alliés ; elle a gardé la route des mers, condition du salut commun ; elle a levé et formé une aimée moderne, aussi belle par la perfection de son matériel que par l’héroïsme de ses soldats. De la guerre, elle sort victorieuse, et avec une force accrue. Mais elle sait aussi quel rôle a assumé notre pays dans le triomphe de tous, quels sacrifices il a consentis pour être l’armée de couverture de la coalition et quelles blessures il garde dans sa gloire ; elle sait que plus que jamais la collaboration confiante de nos deux nations est nécessaire à notre reconstitution comme à la paix du monde.

Ce sont ces sentiments qui ont été exprimés avec une grande élévation au palais de Buckingham par le roi d’Angleterre et par M. le Président de la République. Le souverain anglais a évoqué l’œuvre de rapprochement entreprise par son père le roi Edouard VII, dont le