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Langle de Cary). Remontant vers le Nord, la 5e armée (général Lanrezac) s’étend de Mézières à Hirson, et obtient le 14 seulement l’autorisation de se porter en Belgique vers Dinant et Charleroi. À sa gauche, l’armée anglaise du maréchal French débarquait 4 divisions au lieu de 6 annoncées, — au total 70 000 hommes. — Plus loin, l’armée belge rassemblait ses 6 divisions vers la Gette, entre Namur et Anvers. — En arrière, le général d’Amade formait une petite armée composée de 3 divisions territoriales à partir du 16, augmentée de 3 divisions de réserve à partir du 25. Le général Fournier disposait de 30 000 hommes pour défendre Maubeuge ; le général Percin à Lille s’efforçait d’organiser la défense de la place, que le ministre de la Guerre, cédant malheureusement à la demande des autorités civiles, déclarait « ville ouverte » le 24 août, malgré le général en chef, et contrairement à la loi.

Le 21, l’armée du général de Langle débouche sur le front Sedan-Montmédy et franchit la Semoy. L’armée du général Ruffey s’échelonne sur sa droite. Elles ont devant elles l’armée du kronprinz allemand et celle du duc de Wurtemberg. Le pays est montueux, très boisé et avec des fonds marécageux, d’un parcours difficile ; un brouillard épais gêne les vues. L’exploration est à peu près impossible, la reconnaissance par les avant-gardes pénible, les renseignements sur l’ennemi manquent. On chemine forcément par colonnes, mal soudées entre elles ; l’armée française n’est pas encore rompue aux liaisons latérales entre les états-majors voisins ; le quartier général de l’Armée est trop éloigné et d’ailleurs ne pourrait sans une perte de temps considérable centraliser les renseignements pour les répartir ensuite.

C’est dans ces conditions très défavorables que le 22 s’engage la bataille des Ardennes. Nos têtes de colonnes sont arrêtées par des organisations défensives très sérieuses ; elles sont prises de flanc avant leur déploiement par les contre-attaques ennemies et tombent sous le feu bien ajusté d’une artillerie postée et invisible, tandis que l’artillerie française se met en batterie très difficilement et cherche ses objectifs. Au centre, un corps d’armée ayant changé d’itinéraire sans prévenir son voisin le découvre, ce qui permet à l’ennemi de le prendre de flanc et à revers ; il s’ensuit un recul qui rompt notre ligne. Le corps colonial s’acharne contre des organisations solides et subit sans