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conseil de l’amirauté, je pus devenir le directeur de l’artillerie navale. »

L’amiral Fisher raconte ensuite les difficultés qu’il éprouva pour doter la marine anglaise de sous-marins, rejetés comme d’inutiles jouets par tous les chefs, et il rappelle que c’est à lui que l’on doit, — à lui et à la Bethleem Steel Works d’Amérique, — la prompte mise en ligne des sous-marins britanniques du type II, « qui purent se rendre, dit-il, sans convoyeurs, des États-Unis aux Dardanelles où ils firent des prodiges. » Quelques-uns de ces sous-marins, en effet, ayant réussi à passer sous les filets métalliques de Tchanak-Nagara, maîtrisèrent longtemps la mer de Marmara, empêchant les Turcs de ravitailler par mer les ouvrages du détroit.

Mais il ne suffit pas à l’amiral Fisher d’avoir, pendant presque toute sa belle carrière, plaidé la cause du combustible liquide. Il alla jusqu’à préconiser avec vigueur le moteur à combustion interne dont nous avons parlé tout à l’heure et qui est singulièrement, jusqu’ici, le metteur en œuvre d’élection de ce combustible. « Nous allons commettre d’analogues bévues, dit-il, à propos du moteur à combustion interne, qui est d’une nécessité tout aussi indiscutable pour la marine de commerce que pour la marine de guerre. Toutes les nations, l’Angleterre exceptée, vont de l’avant dans, cette voie. « Herr Ballin[1], » avant son suicide, avait décidé la construction d’une flotte composée de navires énormes, munis de ce genre d’appareils. Les Scandinaves, les Hollandais, les Italiens l’emploient. Nous, nous ne possédons pas, que je sache, un seul gros bâtiment équipé de la sorte. Le Comité des inventions, que je présidai pendant la guerre, monta un laboratoire d’expériences pour étudier ledit moteur, mais cet organe d’études, de dimensions lilliputiennes, est tout à fait insuffisant. C’est de la véritable métallurgie qu’il nous faut, et nous ne pouvons pas en obtenir, pas plus que nous ne réussissons à extraire l’azote de l’atmosphère, cet azote dont a vécu la résistance allemande, etc. etc.. »

Lord Fisher ne se fait d’ailleurs pas illusion sur l’esprit

  1. Le célèbre directeur de la grande compagnie de navigation allemande « Hamburg-Amerika-linie. » Honoré de l’amitié de Guillaume II, M. Ballin se donna la mort en 1917, prévoyant, parait-il, que la guerre sous-marine à outrance, décidée alors, causerait la perte de l’Allemagne.