Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 57.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

UNE MISSION EN ALLEMAGNE



LE

RAPATRIEMENT DES PRISONNIERS




LA SITUATION A MON ARRIVÉE


Le 30 novembre 1918, je recevais l’ordre de partir pour Berlin, afin de procéder au rapatriement de nos prisonniers. Ma mission devait durer six semaines. Elle se prolongea, en se modifiant, pendant quatorze mois.

A mon arrivée à Berlin, le 6 décembre au soir, le représentant du gouvernement allemand me faisait un tableau assez noir de la situation de nos prisonniers, et je pouvais bientôt me convaincre qu’il n’avait rien d’exagéré. Les prisonniers avaient pris trop à la lettre la rédaction de l’article X de la convention d’armistice ainsi conçu : « Rapatriement immédiat de tous les prisonniers. » Or, depuis le 11 novembre, rien n’avait été fait. Dans toute l’Allemagne régnait une décomposition de l’autorité. À côté des anciens commandements fonctionnaient des Comités de soldats qui disposaient seuls du pouvoir. Le laissez-passer qui m’était remis, signé par un colonel directeur au ministère, était contresigné par un délégué du Comité central des ouvriers et soldats, et me recommandait aux autorités militaires et aux conseils de soldats, qui fonctionnaient parallèlement dans chaque camp. L’action du Ministère était à peu près nulle et la situation variait dans chaque cas particulier.

L’effervescence était grande dans tous les camps. Les pri-