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comment finit la guerre.




La situation était très grave. Chacun des généraux en chef pense au salut de son armée, dont il est immédiatement responsable devant son pays. Dès le 24, le général Pétain donne comme directive : « Avant tout, maintenir solide l’armature des armées françaises… Ensuite, si possible, conserver la liaison avec les forces britanniques. » De son côté, le 25, le maréchal Haig écrit d’Abbeville que la disjonction des armées française et anglaise n’est plus qu’une question de temps, et s’apprête à se replier en couvrant les ports du Pas-de-Calais, et il réclame trente divisions françaises à cheval sur la Somme pour couvrir Amiens. Ainsi, les armées britanniques se retireront à l’Ouest, vers la mer, les françaises vers le Sud ; les deux commandements auront fait leur devoir : la séparation mortelle sera consommée et la route de Paris ouverte ; le désastre est imminent, parce qu’il manque le chef unique.

Le maréchal Haig l’a senti ; il provoque la conférence de Doullens où, le 26, arrivent, mandés par lui, lord Milner, ministre de la Guerre impérial, et le général Wilson, chef d’État-major général, pour se rencontrer avec le Président de la République, M. Clemenceau, président du Conseil des ministres, le général Foch et les deux commandants en chef. D’un commun accord, le général Foch reçut la mission de « coordonner l’action des armées alliées sur le front Ouest. Il s’entendra à cet effet avec les généraux en chef, qui sont invités à lui fournir tous les renseignements nécessaires. »

C’était un grand pas vers l’unité de commandement, mais on n’y touchait pas encore. La crise, en continuant, fit franchir une nouvelle étape, et, le 3 avril, le général Foch reçut la « direction stratégique des opérations militaires. » Toutefois chacun des généraux en chef gardait « dans sa plénitude la conduite tactique de son armée… et le droit d’en appeler à son gouvernement si, dans son opinion, son armée se trouvait mise en danger par toute instruction du général Foch. » Il fallut une nouvelle attaque allemande pour l’investir enfin, le 24 avril, du « commandement en chef des armées alliées. »

Le 30 mars, le général Foch donne sa première directive générale : « La tâche des armées alliées dans la bataille actuelle reste avant tout d’arrêter l’ennemi, en maintenant une liaison