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désarroi dans les corps voisins et désorganisent plus ou moins toute la 2e armée. Il s’ensuit un trou, par où l’ennemi menace de prendre à revers la 3e armée (Carso) et la 4e armée (Alpes Carniques). De là dérivera la nécessité d’un recul, que des pertes énormes en prisonniers et en matériel et la désorganisation des unités restantes de la 2e armée empêcheront d’arrêter sur une des lignes de repli préparées à l’arrière.

Sans que ces conséquences puissent encore apparaître à Paris dans toute leur étendue, pourtant la gravité de l’échec italien y est connue dès le 26 octobre. Le jour même, le concours de troupes françaises est spontanément offert à l’Italie. Ce n’est pas sans avoir consulté son conseiller militaire que le Comité de guerre a pris cette initiative : le général Foch et les membres civils du Comité se sont trouvés d’accord pour proposer le secours de nos armes. Le général Pétain, commandant en chef sur notre front, est également favorable à la proposition. Le chef d’Etat-major général français la transmet aussitôt au général Cadorna, tandis que le ministre des Affaires étrangères charge l’ambassadeur de France à Rome, M. Barrère, d’en aviser le gouvernement italien. Les télégrammes qui portent cette offre à Udine et à Rome se croisent avec une demande du général Cadorna, faisant appel à l’aide de la France : elle se trouve exaucée d’avance. L’envoi en Italie de la 10e armée, sous le commandement du général Duchêne, est décidé : ce sont, pour commencer, 4 divisions d’infanterie, avec l’artillerie lourde correspondante, qui seront dirigées au-delà des Alpes. Le transport commence dès le 28 au soir. Le même soir part le général Foch lui-même, qui a reçu pleins pouvoirs du gouvernement français. La rapidité avec laquelle ces mesures ont été résolues et exécutées demeurera à l’honneur du gouvernement de l’époque, de son principal conseiller militaire et de notre haut commandement.

Arrivé à Turin le 29 octobre, le général Foch y trouve un officier de notre mission militaire au G. Q. G. italien, le colonel Girard, venu à sa rencontre pour le mettre au courant de la situation. Les armées italiennes sont en retraite vers la ligne du Tagliamento. C’est là un mouvement qu’avaient laissé prévoir au général Foch des télégrammes du général Cadorna reçus avant son départ de Paris. Le commandant en chef italien avait d’abord exprimé l’espoir de pouvoir préserver le Frioul de