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L’ALLEMAGNE POLITIQUE

I
LA NOUVELLE FORME DU PANGERMANISME
(MARS-SEPTEMBRE 1919)

Un jeune savant, qui connaît fort bien l’Allemagne, nous écrivait récemment : « Ce qui m’inquiète le plus, c’est que le nationalisme allemand, qui m’a semblé très affaibli pendant la guerre, du moins dans la petite bourgeoisie et dans le peuple, s’est réveillé plus intense que jamais. Il n’est plus un Allemand, je crois, qui ne désire une revanche : militaire, ou révolutionnaire, ou économique. »

Les événements actuels justifient ce pessimisme. A mesure que se dissipe la stupeur provoquée par la soudaine défaite, l’idée de revanche se développe chez l’ennemi. Mais il y a plusieurs manières de concevoir la revanche. S’imaginer que l’Allemagne ne les envisage pas toutes, c’est se leurrer d’illusions. Elle veut retrouver la situation qu’elle avait dans le monde à la veille de la guerre. Telle est la directive générale. Or le monde a changé. De nouveaux problèmes s’imposent à l’attention et à l’effort des peuples. Le but ne pourrait-il être atteint autrement que par un retour, improbable avant longtemps, de fortune militaire ? Au lendemain de l’armistice, un industriel de Francfort déclarait indiscrètement : « Nous sommes vaincus, c’est entendu. Mais nous vous « aurons » quand même. Nous favoriserons si intelligemment le socialisme, nous élaborerons des lois ouvrières telles que les masses prolétariennes de tous pays se tourneront infailliblement vers nous et que nous provoquerons, surtout en France et en