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« Les mesures que les Puissances alliées et associées auront le droit de prendre, en cas de manquement volontaire par l’Allemagne et que l’Allemagne s’engage à ne pas considérer comme des actes d’hostilité, peuvent comprendre des actes de prohibitions et de représailles économiques et financières et, en général, telles autres mesures que les gouvernements respectifs peuvent estimer nécessitées par les circonstances. » Les sanctions sont donc laissées à la libre appréciation des gouvernements alliés. Le mot « respectifs » indique même qu’après la constatation officielle du manquement, chaque gouvernement intéressé est maître de prendre seul les mesures qu’il juge le plus convenables à la défense de ses droits. Je comprends que, par déférence vis-à-vis des Alliés et par égard pour la commission, le gouvernement français n’ait pas revendiqué le privilège d’une action séparée, mais il n’aurait pas violé le traité en prenant isolément ses garanties. En tout cas, la lettre de la commission, si elle recommandait l’accord entre les alliés, concluait à l’adoption de mesures immédiates: elle excluait formellement l’idée de toute conversation nouvelle avec les Allemands. Aussitôt saisis, qu’ont fait cependant les gouvernements? Tranchons le mot, ils ont désavoué la commission. Elle joue décidément de malheur avec eux. Non seulement les Alliés n’ont pas pris sur-le-champ les sanctions qu’elle les invitait à prendre, mais ils se sont, tout de suite montrés beaucoup plus bienveillants qu’elle envers l’Allemagne. Ils ont remanié les chiffres, ils ont accordé à l’Allemagne une prime de cinq marks or par tonne et, chose encore plus inexplicable, ils ont consenti à lui faire, en contre-partie du charbon qu’elle s’engageait à livrer incomplètement, des avances importantes, qui incomberont surtout à la France et imposeront à notre trésorerie une charge supplémentaire de plus de deux cents millions par mois. Il n’y avait aucun motif valable pour joindre ainsi la question du charbon et celle des avances. Le traité nous assure le charbon; le charbon nous est dû. Si les Alliés pensent que, pour aider l’Allemagne à se relever, il est opportun de lui faire des avances, qu’ils les fassent, du moins, dans la proportion de leurs moyens. C’est un défi au bon sens d’en répartir le poids entre eux en raison directe des pertes qu’ils ont subies et d’en imposer la plus large part à la France, sous prétexte qu’elle reçoit plus de charbon que les autres; car pourquoi, s’il vous plaît, reçoit-elle ou doit-elle recevoir plus de charbon? Parce que ses mines ont été détruites par l’ennemi commun. Aucun crédit, du reste, ne peut être ouvert à l’Allemagne que par les