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criminellement hésité entre l’énergique volonté du G. Q. G. et une opinion publique flottante ou désorientée ? La politique allemande n’a pas été à la hauteur des chefs militaires. Elle a gâché leur œuvre admirable. » Et c’est ainsi que ces attaques contre Bethmann aboutissent à une apologie du militarisme.

L’anniversaire de la Révolution en novembre, les réflexions de fin d’année, la ratification de la paix, autant d’occasions à saisir. « Le bilan de cette première année de nouveau régime, c’est la ruine. Nous avons besoin d’un chef, d’un Moïse, d’un idéal national. L’Europe est en morceaux ; l’ancienne armée a vécu. L’Allemagne n’est plus qu’une salle de danse et un enfer de jeu. L’année 1919 comptera comme la plus lugubre de l’histoire allemande. — Mais, ajoute-t-on, l’opposition monarchiste est bien résolue à ne pas désarmer. Attendez que la décomposition sociale ait atteint nos ennemis et vous verrez l’Allemagne ressusciter, plus forte que jamais ! C’est nous, les vainqueurs ! C’est nous qui avons brisé l’élan du slavisme en marche contre l’Europe occidentale ! C’est nous qui avons vaincu, dans toutes les batailles, les Français, les Anglais, les Roumains et les Italiens ! Prenez-y garde, l’esprit de Potsdam vit encore ! »

En janvier et février, la question de l’extradition vient encore alimenter cette préparation de l’opinion publique. La réaction utilise admirablement le conflit. Elle conseille à l’Allemagne de suivre l’exemple de la Hollande qui défend son « honneur national » en refusant de livrer Guillaume II. Elle insinue que l’Entente se disloque peu à peu et qu’un refus net de l’Allemagne achèvera de la démembrer. En même temps, le comte Westarp annonce, « de source sûre, » qu’une offensive bolchéviste aura lieu au printemps, que l’Allemagne va devenir, comme pendant la guerre de Trente ans, le champ de bataille de l’Europe entière. Raison de plus pour défendre l’armée !

Ce sera enfin la campagne de mars pour la dissolution de l’Assemblée nationale, les élections à brève échéance, l’élection du Président par le peuple. Ou salue alors la candidature d’Hindenburg. « Son nom, dira le comte Westarp dans le Kreuzzeitung du 7 mars, remplit de confiance le peuple allemand et son élection montrera à tous que nous ne sommes pas des ingrats, que nous n’oublions pas les incomparables exploits de notre armée, que notre orgueil national n’est pas éteint. »

Victorieux dans le procès Helfferich-Erzberger et dans la