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Je devais prévenir le général Conneau que l’attaque de la 13e division d’infanterie sur Lens et abords traverserait selon toute vraisemblance vers 6 heures le pont de La Bassée et que l’attaque elle-même se produirait vers 10 heures sur Lens. Je devais également lui dire que la 43e division d’infanterie serait en place à 6 heures derrière Mont-Saint-Eloy et que son attaque se produirait probablement vers 8 heures, quand le général de Maud’huy en donnerait l’ordre. En conséquence, je devais demander au général Conneau d’opérer sur son objectif principal, Givenchy, en liaison étroite avec ces deux attaques d’infanterie qui allaient se déclencher l’une à sa droite, l’autre à sa gauche.

« Qu’il pousse à fond et avec tout son monde ! » Tel fut le dernier met que me pria de transmettre le général de Maud’huy.

Malheureusement, il était déjà 5 heures 15 quand je quittai Saint-Pol, encore en pleine nuit, roulant vers le château de Labussière situé à plus de trois quarts d’heure d’auto du quartier général de l’armée… et il était 6 heures quand, au petit jour, je pénétrai au milieu des spahis blancs et rouges, sabre au clair, qui gardaient le parc du beau château.

Un officier de service me reçut et alla réveiller le colonel chef d’état-major, puis le général Conneau.

Celui-ci me reçut au seuil de sa chambre sur le palier de l’escalier d’honneur. Je vois encore la haute stature du chef de la cavalerie française dressée là entre les battants dorés de la grande porte laquée blanc, à la lueur des flambeaux que portait un ordonnance.

Après avoir lu l’ordre et avoir écouté la communication verbale dont m’avait chargé le général de Maud’huy, il se retira dans son appartement avec son chef d’état-major et j’attendis au bas de l’escalier en compagnie de l’officier de service. J’attendis exactement cinquante minutes. Et à 6 heures 50, les ordres qui venaient d’être rédigés et tapés à la machine partirent aux divisions.

Le grand jour était levé ; vers La Bassée et Mont Saint-Éloy les mouvements préparatoires aux deux attaques d’infanterie devaient être en cours ou déjà exécutés… et les divisions de cavalerie n’étaient même pas encore au courant de la situation et n’avaient point encore reçu leurs ordres… Il ne fallait pas être grand clerc en état-major pour calculer le temps qu’il