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Dans l’unanime amour le rite se déroule.
Le Verbe se fait chair ; au rythme du saint lieu,
Les coiffes s’ébattant d’un mouvement de houle
Oscillent, blanche mer, sous le souffle de Dieu.




On sort, on se salue et chacun se retire
Par le sentier bordé de cormiers et d’ajoncs,
On retrouve au logis le vieux chien qui s’étire
Au milieu des pigeons.

L’après-midi se passe en liesses rurales :
Les hommes, décrochant les fusils bosselés,
Battent les champs de choux d’où s’échappent les râles ;
Les vieillards lentement longent le bord des blés ;

Des femmes, chevauchant l’ânesse qui va paître.
Voisinent ; tous font là ce qu’ont fait les aïeux.
Pas de bal ni d’auberge : un beau loisir champêtre.
Grave, religieux.

Dieu visite vraiment ces doux vallons sévères
Où de la tâche humaine on n’aperçoit plus rien.
Seuls, parmi le repos qui plane, les calvaires
Accomplissent encor le geste quotidien.
 
Ainsi coule au soleil, dans la campagne plate,
Cet entr’acte du ciel, fugitif et sans heurt,
Vêpre silencieuse où quelquefois éclate
Un coup de feu qui meurt.




Mais l’Angélus du soir dit la fin de la trêve.
L’homme alors que son chant surprend aux carrefours
Songe qu’il va falloir, après la halte brève,
Continuer demain le long sillon des jours.