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conférence, le général en chef français acquérait tous les jours une nouvelle autorité. Le gouvernement comprit quel parti il pouvait tirer de cette situation exceptionnelle due aux mérites et aux titres du général Joffre : par décret du 2 décembre 1915, celui-ci fut nommé commandant en chef des armées françaises et qualifié pour traiter au nom de la France, avec les commandants en chef des armées alliées, toutes les questions relatives à la direction de la guerre et à l’emploi général des forces de la coalition. C’est dans ces conditions que le plan de bataille de 1916 fut élaboré.


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L’année 1915 s’achevait dans des conditions peu satisfaisantes. Sur tous les fronts éloignés, les armées de la coalition avaient été tenues en échec ou battues ; à l’entrée de la mauvaise saison, si les armées françaises et britanniques avaient remporté des succès tactiques, elles avaient le plus grand besoin de se refaire ; l’armée russe, éprouvée par une longue série de défaites, demandait à être réorganisée à fond et notamment au point de vue matériel ; l’armée italienne se trouvait immobilisée et l’armée serbe en pleine déroute. L’ennemi réussissait dans toutes ses entreprises. Au début de décembre, il avait ramené sur le front français des effectifs élevés ; il neutralisait les armées russes sur son front oriental, tenait en respect les Italiens, et était sur le point de récupérer, pour d’autres desseins, la masse austro-allemande employée à l’expédition de Serbie.

C’est à la conférence de Chantilly des 5, 6 et 8 décembre 1915 que fut élaboré, sous la direction personnelle du général Joffre, le plan de la coalition pour 1916. Pour la première fois, une direction unique se manifestait : « Arrêter des offensives concertées sur les fronts franco-britannique, russe et italien ; rechercher la décision par des offensives concordantes et donner à ces offensives leur maximum de puissance comme effectifs et comme moyens matériels, » tel était le dessein exposé par le général Joffre.

Il espérait atteindre un certain équilibre par l’effort organisé de la coalition. Si cet effort était soutenu, il comptait aboutir vers la fin de 1916 ou dans le premier semestre de 1917 à la destruction et à la mise hors de cause des armées allemandes. Les résolutions suivantes avaient été adoptées de concert :