Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/567

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

désir de les sauvegarder, a fondé l’une de ces sociétés immobilières. Comme c’est un excellent prêtre, en qui j’ai pleine confiance, je l’ai laissé faire, mais je n’ai été consulté ni sur le nom ni sur la personne des actionnaires, ni sur la rédaction des statuts ; jamais, depuis dix ans au moins que cette association fonctionne, elle ne m’a soumis le moindre rapport, ni demandé en rien mon approbation ou simplement mon avis. Je reste absolument étranger aux décisions, aux projets discutés ou votés par l’association. » Avouez qu’il serait difficile aux Cultuelles, eussent-elles tous les vices qu’on leur prête, d’être plus anti-hiérarchiques ou, si l’on préfère, plus extra-hiérarchiques, ce qui dans le cas est la même chose. Il est d’ailleurs évident que les sociétés immobilières n’offrent et ne peuvent offrir au curé ou à l’évêque aucun recours légal contre leurs décisions.

Faudra-t-il donc revenir à la loi de 1912, aux Syndicats, proposés, dit-on, au Saint-Père par quelques-uns de nos Eminentissimes Cardinaux ? Mais, outre que c’est l’inconnu, un système nouveau, dont la faculté de posséder est encore incertaine et pour une grande partie en projet, sur le bureau de la Chambre, cette forme de Syndicat appliquée à l’Église de France répugnerait à beaucoup de catholiques et à la grande opinion, qui ne se résignerait pas à voir, en l’Eglise de France, un grand Syndicat, — le mot et la chose ayant été réservés jusqu’ici à des intérêts d’ordre inférieur, commerciaux, industriels, et purement matériels. Et puis, là aussi, où serait la garantie offerte à notre hiérarchie ? Il n’y en a pas. Si nous sommes bien renseignés, les Cardinaux dont nous avons parlé auraient projeté de diviser l’Église de France en Syndicats régionaux, composés exclusivement de tous les évêques de la province, qui posséderaient légalement et administreraient tous les biens de cette province et de chacun de ces diocèses en particulier. Mais il serait impossible qu’un Syndicat dont le siège social serait par exemple à Paris possédât des biens pour chacun des diocèses de la région, par exemple un Grand Séminaire dans le diocèse de Versailles, car le Syndicat légalement ne peut posséder que les biens communs à tous les associés et non pas les biens de chacun d’eux, fussent-ils identiques : on a confondu biens communs et biens identiques. Sur ce nouveau terrain la hiérarchie reste donc encore sans garantie : si des prêtres, ou des fidèles, ou simplement des sectaires, transformés en