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finances publiques n’y était pas moins déplorable, puisque la valeur de la couronne était tombée à huit centimes et que la circulation fiduciaire avait atteint des chiffres effrayants. Cependant, dès le 20 avril 1920, le chancelier Renner faisait entendre à l’Assemblée nationale des paroles rassurantes et déclarait le pays sauvé de la guerre civile et de la ruine économique. Depuis lors, la Section d’Autriche de la Commission des Réparations a étudié, avec beaucoup de bienveillance, les moyens d’aider l’Autriche à se relever et le gouvernement de Vienne ne peut que se féliciter du concours qu’il a trouvé chez les Alliés. Ce n’est ni le mécontentement contre nous, ni le désespoir, ni l’impossibilité de vivre, qui ont provoqué l’intempestive manifestation de l’Assemblée nationale. Il y a en Europe beaucoup d’États plus petits et moins peuplés que l’Autriche, et qui prospèrent. L’Autriche est géographiquement placée dans une position très avantageuse pour le développement de son commerce international. Elle est sur le chemin de l’Allemagne et de la Tchécoslovaquie à la Méditerranée et à l’Adriatique, comme elle est sur le chemin de l’Europe occidentale à Constantinople et à l’Asie-Mineure. Elle peut aisément redevenir un des grands marchés du monde.

Elle a, d’ailleurs, à sa disposition des richesses importantes. Les Alpes autrichiennes sont beaucoup plus boisées que les Alpes centrales ou occidentales. Les forêts couvrent quarante pour cent de la superficie totale de la nouvelle Autriche. Une partie des bois exploités alimente les industries locales; une autre partie sert pour le chauffage; mais il reste, au moins, deux millions de mètres cubes à exporter par an. Les chutes d’eau sont très nombreuses et, comme un député, M. Goldemung, le disait le 30 avril à l’Assemblée nationale, l’utilisation des forces hydrauliques est pour le pays une grande ressource d’avenir. Aussi bien l’Assemblée vient-elle de voter l’électrification de plusieurs lignes ferrées représentant, au total, plus de six cent cinquante kilomètres. L’industrie métallurgique est très florissante. Il y a du minerai de fer en abondance à l’Erzberg, à Graz, à Eisenerz, des salines à Salzbourg, à Salzkammergut et dans le Tyrol. Ajoutez à cela des filatures, des verreries, des tanneries, des pelleteries, des usines de produits chimiques, des minoteries, des brasseries, des fabriques de meubles, des industries de luxe dont plusieurs rivalisent avec celles de Paris. Vous conclurez que l’Autriche n’est pas encore morte, si elle veut se donner la peine de vivre. Aujourd’hui assurément elle souffre, comme beaucoup d’autres pays, et dans des proportions plus fortes que la plupart d’entre eux, du