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du gouvernement français. Mais nous sommes-nous concertés, à cet égard, avec nos Alliés? Partagent-ils notre opinion? Et, s’ils la partagent, l’Allemagne en est-elle avertie?

Il est visible qu’elle continue à spéculer sur les divisions des Alliés, et cela non seulement dans les graves questions territoriales de Haute-Silésie et d’Autriche, mais dans tous les incidents que soulèvent les essais d’application du traité de Versailles. La presse allemande a vanté, ces jours-ci, très bruyamment, la bonne foi que le Reich aurait mise à observer, pour la date du 1er octobre, les accords passés à Spa au sujet du désarmement et de la livraison du charbon. Certains journaux français ont, à leur tour, enregistré comme un succès national ce commencement d’exécution. Mais n’oublions pas que les accords de Spa ont marqué un recul sensible par rapport au traité. Pour le désarmement, ils ont accordé à l’Allemagne des délais supplémentaires, et rien ne nous prouve encore, d’ailleurs, que les licenciements soient effectifs et que nous ne soyons pas joués une fois de plus. Pour le charbon, nous avons réduit les quantités auxquelles nous avons droit, nous avons augmenté les prix et nous avons consenti des avances à l’Allemagne. Le Reich aurait été assurément bien mal inspiré de compromettre les avantages qu’il tire d’une telle opération. Mais ce qu’on s’est gardé jusqu’ici de nous dire, c’est qu’il ne nous livre pas les qualités de charbon promises ; et, quant au tonnage, le gouvernement avait déclaré au Sénat que la différence entre les quantités prévues au traité et les livraisons résultant du protocole de Spa demeurerait due par l’Allemagne : avons-nous obtenu, à cet endroit, une garantie quelconque ? Pas la moindre ; et, pour nous enlever toute illusion, le commissaire allemand du charbon, M. Stutz, communiquait, il y a quelques jours, à la presse une note significative, où il prétendait que la convention de Spa suscitait à l’Empire les plus sérieuses difficultés et où il donnait à entendre qu’elle devrait être bientôt révisée au bénéfice de l’Allemagne.

Sans doute, le docteur Mayer, qui était chargé d’affaires du Reich à Paris et qui vient d’être nommé ambassadeur d’Allemagne, a tenu, en remettant ses lettres de créance, un langage parfaitement correct, qui concordait, du reste, avec son altitude personnelle et M. Millerand, dans sa réponse, a clairement indiqué que la loyale exécution du traité de Versailles était la condition essentielle des futures relations entre les deux pays. Mais, au même moment, l’Allemagne essayait de renouveler, auprès de la France, les propositions que M. de Simons et M. Stinnes avaient déjà faites à Spa et qui,